Depuis son incarcération en novembre 2012, Christine proteste régulièrement contre l’arbitraire de la pénitentiaire et pour l’application des droits (théoriques !) des prisonniers et prisonnières. Ce qui lui vaut un enchaînement de conflits avec les surveillants et l’AP, de CRI (compte-rendus d’incidents), placements au mitard et au quartier d’isolement, transferts disciplinaires, et quelques procès… Tout ceci durcit et rallonge sa peine. L’Envolée et divers sites internet relaient ce qu’elle relate dans ses lettres*. Dès son arrivée au centre de détention de Réau, mi-octobre 2013, elle a refusé de prendre la carte de circulation nécessaire aux passages des multiples sas de sécurité en détention, ce qui lui a valu d’être directement placée en régime « portes fermées ». Le 5 mars, elle est passée en procès au TGI de Melun, accusée d’avoir mordu un surveillant au cours d’une prise de bec pour la réouverture de la « salle de convivialité » (voir lettre et compte-rendu ci-dessous). Elle re-passera bientôt devant le tribunal de Lyon, qui l’avait condamnée en février 2013 à trois mois de prison ferme pour 7 délits, dont : « refus de prélèvement ADN », « outrage et rebellion », « évasion » de garde à vue… Le parquet, souhaitant une peine plus lourde, avait fait appel. L’audience aura lieu à la cour d’appel de Lyon le 14 avril à 13h30, et la présence d’un public solidaire sera la bienvenue. Christine a été transférée à nouveau fin janvier 2014, elle est à l’heure actuelle au centre pénitentiaire pour femmes de Rennes.
Son adresse : Christine Ribailly écrou 7993,CPF de Rennes, 18 bis rue de Châtillon, 35031 RENNES Cedex
Bref compte-rendu du procès du 5 mars au TGI de Melun : Christine était accusée d’avoir mordu le surveillant Ha-o-kwi. Quelques personnes étaient venues la soutenir. Le procureur et les parties civiles réclamaient la peine plancher de un an pour récidive, et un dédommagement de 500euros pour le doigt du surveillant, insistant sur la nécessité de punir sévèrement cette détenue récalcitrante qui selon eux menaçaient la détention. Son avocat, Benoît David, de l’association Ban Public (voir http://prison.eu.org/), a tout d’abord plaidé la relaxe pour divers vices de procédures. Il a aussi insisté sur le fait que Christine ait été tabassée suite à la prise de bec avec Ha-O-kwi, qui curieusement n’a porté plainte que trois semaines plus tard… quand les images de vidéo-surveillance n’étaient plus visionnables ! Christine a terminé en parlant de la prison : « Je n’ai jamais avoué à ma grand mère que j’étais en prison, elle n’arrêtait pas de demander quand je viendrais la voir. Elle est morte avant que je sorte de prison. Voilà ce que c’est la prison. Je me demande en quoi cela protège votre société ? » Christine et son avocat ont eu la « bonne » surprise de ne la voir condamnée « que » à un mois de prison supplémentaire et 200euros d’amende. Une peine qui reste lourde, même si on s’attendait à pire, connaissant les habitudes de la justice dans ce genre d’affaires.
A suivre…
*Un des épisodes précédents est relaté ici : http://rebellyon.info/?Delibere-d-Arras-et-d-autres et une autre lettre de Réau est lisible ici : http://rebellyon.info/?Resistance-a-la-taule-de-Reau-un
Lettre de Christine au sujet des évènements survenus à Réau :
« CD de Rennes, jeudi 6 février 2014 Au Centre de Détention Femmes de Réau, les filles qui n’ont plus le droit au « régime de responsabilité »1 (donc que l’AP maintient en irresponsabilité avec la complicité de l’UCSA) ont quand même la possibilité de faire les deux premières heures de promenade de l’après-midi au chaud. Ils appellent ça « la salle de convivialité » et on peut y avoir accès à quelques jeux de société. Le 2 décembre, j’y étais juste avec Kaoutar (qui cartonne au scrabble!). Dans le couloir on a entendu du grabuge car une fille voulait y venir alors que la matonnerie le lui refusait (depuis, selon son souhait, elle a été transférée, elle devrait même être dehors à l’heure qu’il est). Le 3 décembre, on n’a pas eu accès à cette salle car elle sert aussi de vestiaire quand il y a des arrivantes. Et le 4 au matin, une affiche la déclarait fermée, sans explication et sur ordre de la direction. J’ai demandé aux surveillantes puis aux gradés pourquoi, aucun n’a voulu me répondre, tant il était évident que c’était juste une crise d’autorité injustifiée. Je suis alors allée demander à l’officier, dans son bureau. Il a encore forcé la dose sur l’autoritarisme et le mépris, m’envoyant, grâce à un CRI mensonger, au mitard pour 18 jours. Au prétoire du 6, la directrice a dit qu’elle ré-ouvrirait la salle « dans une semaine ». Mais quand je suis sortie du QD le 21 décembre, la salle était toujours fermée, sans plus de raison. On en a parlé en salle de muscu avec les filles du RDC et on a décidé de demander la ré-ouverture mais aussi une ouverture exceptionnelle le 1er janvier à midi « pour commencer l’année sous le signe de la bonne camaraderie », selon les termes de notre courrier signé par 11 d’entre nous (sur 13 au rez-de-chaussée!). Les chefs ont eu cette lettre collective le 24 au soir. Le vendredi 27, on n’avait toujours pas de réponse. J’ai insisté auprès des chefs qui m’ont refusé une audience mais ont pris 5 filles à part pour leur dire « Ne suivez pas Ribailly dans ses conneries. On peut très bien vous mettre un CRI car les pétitions sont interdites. C’est nous, et nous seuls, qui décidons si la salle sera ré-ouverte et quand ». Elles sont rentrées à fond dans la menace et m’ont dit qu’elles feraient rien qui risquerait de déplaire à la pénit’. Moi, j’ai chopé la directrice dans le couloir dès que j’ai pu, c’est à dire le lundi 30. Elle m’a dit, une fois qu’elle a compris que je lui collerai aux basques jusqu’à avoir une réponse, que la salle serait ré-ouverte le lundi 6 (c’est à dire à la fin des vacances scolaires, quand les activités reprendrons, logique,…) et qu’ils allaient décider en équipe pour l’ouverture de mercredi, qu’on en serait informées le lendemain en fin d’AM. Donc le mardi 31, à 15h, juste à la sortie du gymnase, je suis appelée au bureau des chefs. Il y avait 2 bricards, Ho-a-Kwie et Borde, une nouvelle. Il m’a dit : « Je t’ai appelé pour te donner la réponse pour la salle demain ». J’étais convaincue que c’était refusé et j’ai dit : « pourquoi juste moi ? On est 11 à l’avoir signé cette lettre, il y a une semaine ! » Il a essayé d’expliquer que j’étais la seule à avoir mis une affiche (c’est vrai et ça m’a valu un CRI de plus, à mettre sur la pile), à avoir alpagué la dirlo, donc que j’étais la porte-parole. J’ai refusé ce terme et il m’a dit qu’il préviendrait chacune des filles individuellement. Après, ils m’ont passé des documents administratifs, en partie périmés que j’ai bâclé, et je suis partie. Une dizaine de minutes plus tard, j’étais de retour, un peu calmée et j’ai demandé un imprimé pour répondre aux papiers que j’avais jetés. Et (et c’est juste à ce moment-là que j’ai eu tort car je savais qu’ Ha-o-kwie est un sale menteur), avant de partir, je me suis retournée vers lui : – Tu préviens les filles une par une, hein ? Parce que depuis 10 min, tu n’as rien fait, alors que la moitié sont à la biblio où tu pourrais nous parler à toutes en même temps. – Je fais ce que je veux ! – Non, foutu psychopathe, tu ne fais pas ce que tu veux ! Tu as pris un engagement, tu le tiens ! Si t’as un problème avec la « toute puissance », vas donc voir le psychiatre que vous m’avez balancé dans les pattes alors que je réclamais la radio au mitard ! – Tu t’en vas de ce bureau ! – Et pourquoi ? Pour te laisser le temps de rédiger un CRI pour l’affiche, alors que tu dois nous répondre ? – J’ai dis que je te répondrais. Je le ferai si je veux, c’est ça la liberté d’expression ! – Sale menteur ! Vous passez votre temps à ça : mentir et menacer. Comme quand vous avez dit aux filles de se méfier de moi… – On sait bien que c’est toi qui a écrit cette lettre. Et il n’y a que toi qui fait chier… – Quoi ? J’ai pas écrit cette lettre ! Je l’ai rédigée, c’est tout ! On est 11 à l’avoir signée ! – Ouais, t’as même fait signer les filles qui savent pas écrire ! – Qu’est ce que tu dis là ? C’est vous qui menacez les filles, pas moi ! Y a des filles qui t’ont dit qu’elles avaient signé alors qu’elles ne voulaient pas manger ensemble, peut être ? – On m’a dit que tu leur faisais peur… Là, ça a été trop ! J’ai fait un pas en avant, bien vif, dans sa direction, mais sans le toucher. Borde et deux matonnes qui s’étaient approchées à cause du bruit de l’engueulade, m’ont saisie par le bras, lui a bondi de son siège, effrayé. Je n’ai pas bougé, j’ai juste ricané : « C’est toi qu’a peur, minable menteur ! ». Alors qu’elles étaient trois à me tenir sans que je me débatte, il a pointé son index sur moi pour me menacer : « c’est une agression sur personne ! Tu vas manger ! ». Je l’ai laissé délirer trente secondes puis, lassée, j’ai fait mine de le lui happer le doigt. Je sais que je n’ai pas serré les dents, mais il est aussi douillet que lâche et l’alarme a été lancée. Ils m’ont foutue au sol et menottée dans le dos pendant que ce [biiiiip] m’envoyait des coups de poing au visage. Au mitard, ils m’ont arraché mon survêt’ (avec lacet) et m’ont laissée à poil et menottée pendant près d’une heure. Je n’ai eu l’ensemble de mes affaires que 36h plus tard. Je n’ai vu le toubib que 72h après, c’est à dire après le prétoire qui a eu lieu le 2 janvier. Le prétoire a été dégueulasse. Il y avait un vice de procédure énorme (je n’ai pas eu le dossier 24h avant ) mais mon commis d’office était minable. Il n’y avait pas non plus les images de la caméra qui donne sur le bureau des chefs et qui devaient montrer les coups de poing au visage (confirmés par le certificat médical, 3 jours après). Il n’y a même pas le Compte Rendu Professionnel (CRP) d’une matonne qui dit que j’ai crié au chinois « c’est toi qui a peur ! » et qu’elles me tenaient quand je l’ai « mordu », mais la dirlo n’en a pas tenu compte. Il n’y avait aucun certificat médical constatant cette « grave blessure » que je lui avais infligé. Bref, sans originalité, j’ai pris 30 jours avec une promesse de dépôt de plainte et de transfert disciplinaire à la clef. Le lendemain, le mitard étant très proche de la cour du RDC, les filles m’ont saluée et m’ont dit qu’on leur avait proposé à 11h d’aller à la salle de convivialité. À sept, elles ont partagé le sac que j’avais préparé pour ça (soda, gâteaux, bonbons, saucisson). Elles n’y sont pas restées à midi parce que c’est interdit d’y fumer. Depuis, je ne les ai pas ré-entendues dans la cour mais l’aumônière m’a dit qu’elles me saluaient bien. Une autre bonne nouvelle : mercredi, bien sûr, quand j’ai pu aller en promenade, j’ai dit : « je rentrerai quand il y aura un transistor ». Ils sont venus, comme d’habitude, avec casques et boucliers. Jeudi, ils m’ont laissée en promenade de 11h à 14h30 ! Mais quand je suis rentrée en cellule, en plus de la gamelle froide, il y avait un petit poste de radio FM. On ne capte que Radio Autoroute, ce qui n’a rien d’exaltant, mais c’est quand même une victoire. Ma voisine de QD qui était là depuis 12 jours, a eu aussi le sien. Elle n’a pas compris l’ironie quand j’ai lancé « El pueblo unido jamás será vencido » en guise de chant de victoire. […] Les 30 jours sont passés, lentement bien sûr, mais sans trop de provo, à part le refus de courrier interne, commun à tout le CPSF (Centre Pénitencier Sud Francilien), de leur part. J’avais la radio et j’ai eu un parloir de 2h30 avec ma mère. J’appréciais les visites des aumônières ou autre pour le break, pour voir des gens sans uniforme. J’attendais aussi la GAV. Elle n’a eu lieu que le 28, à la toute fin. Contrairement aux gendarmes de Bapaume, les flics de Moissy on été bien cons durant la GAV, singeant la paranoïa des matons, même après 2 heures d’audition. J’ai appris, quand j’ai pu lire le dossier avec l’avocat de la comparution immédiate, que ce pauvre maton violenté, qui a récupéré 1 jour d’ITT (alors qu’il était au boulot le lendemain), n’a été déposer plainte au comico de Moissy Cramayel que le 22. Au tribunal, à 20h30, j’ai refusé d’être jugée sans un avocat correct et avec plein de pièces manquantes (notamment le témoignage de la matonne du 31 décembre, mon certificat médical du 3 janvier et les images de la caméra de la coursive). Bref, je repasse le 5 mars à 13h30 au TGI de Melun et Ha-o-Kwi sera partie civile (pour avoir un 13ème mois). Le lendemain, j’étais, après 30 jours de QD, transférée à Rennes. Là, je suis au quartier arrivante du CD. L’architecture ici est très différente des prisons Bouygues. Il y a moins de caméras et pas de sas. Les matons ne sont pas cachés dans leurs aquariums à déclencher des portes à distance. Donc ils sont moins paranos, donc ils sont moins dangereux, donc ça va mieux. Bon, je ne me fais quand même pas d’illusion, j’attends de voir où se niche leur perversité… en profitant de l’herbe dans la cour de promenade et en retournant au sport. »
Archives de l’auteur : marseille infos autonome
Sortie de l’Envolée n°38
Dire à un être humain qu’il va rester en prison toute sa vie est une chose ; le lui faire accepter en est une autre.
Christophe Khider et Philippe Lalouel ont récemment dit à l’issue de leur procès que les peines auxquelles ils venaient d’être condamnés étaient inacceptables et qu’ils ne les feraient pas ; même pas en cauchemar. Certes, dans un éclair de lucidité, des médias, des politiques et certains intellectuels ont applaudi la libération de Philippe El Shennawy, âgé de 58 ans, après trente-huit ans de prison ! Mais après quels combats a-t-il été libéré, et à quel prix ? À sa sortie, il dénonce « une liberté au rabais » : deux ans de bracelet électronique, dix-huit de conditionnelle, c’est la prison dehors ! Et au moindre pet de travers, il retournera derrière les barreaux. Il évoque les milliers d’autres qui attendent la fin d’une peine infinie, empêtrés dans le calcul d’hypothétiques remises de peine, dans les conditionnelles et les périodes de sûreté… sans compter l’administration pénitentiaire qui les cachetonne pour les faire végéter dans l’insupportable et le dénuement.
Nous répétons que l’abolition de la peine de mort en 1981 a abouti, logiquement, à un allongement interminable des peines. Depuis, le code pénal n’a cessé de s’alourdir et les lois sécuritaires s’accumulent. Le droit arrive au bout de l’impasse dans laquelle il s’est engouffré. Ceux qui avaient été condamnés à l’époque à des peines de vingt-cinq ou trente ans les purgent encore aujourd’hui, et ils sont rejoints tous les jours par de nouveaux condamnés jusqu’à la mort. Comment faire exécuter ces peines ? Comment faire pour que des hommes et des femmes à qui on refuse tout avenir se tiennent tranquilles ? L’État a sa réponse : il construit et expérimente deux nouvelles prisons ultra-sécuritaires. Celle de Vendin-le-Vieil n’est pas encore inaugurée que ça pète déjà à Condé-sur-Sarthe, ouverte il y a dix mois. Alors quoi ?
Déjà en 1985, les émeutes de Fleury, Saint-Maur, Ensisheim dénonçaient toutes le mécanisme des peines de sûreté et l’allongement des peines. Les prisonniers avaient compris que l’abolition était une supercherie. Ils ont à peine été entendus.
En 2001, quand Badinter organise lui-même la commémoration de l’abolition, de nombreux prisonniers longues peines en sont déjà à vingt ans d’incarcération. À cette occasion, certains font sortir de plusieurs centrales des vidéos, des textes, des cartes postales, des affiches… pour dire haut et fort que la prison n’a jamais autant tué depuis la fin de la seconde guerre mondiale, que les peines sont de plus en plus longues et les libérations conditionnelles de plus en plus rares.
Toujours pas entendus.
En 2006, dix prisonniers de la centrale de Clairvaux rédigent un appel dans lequel ils demandent le rétablissement de la guillotine pour eux-mêmes, pour en finir avec l’hypocrisie du système judiciaire et carcéral. Ignorés.
En 2014, Taubira, ministre des tribunaux et des prisons, prépare sa réforme pénale qui n’améliore en rien le sort des personnes sous main de justice. Certains commencent à réaliser que tout espoir est vain, car les condamnations délirantes des cours d’assises assassines, eh bien, il va falloir les endurer jusqu’au bout. Les plus longues peines ont pour seule perspective une sortie vers 65-70 ans, voire au-delà…
C’est pas pour rien que des révoltes individuelles et collectives se multiplient depuis quelques mois. Il faudra bien que les prisonniers longues peines finissent par se faire entendre, pour eux et pour tous les prisonniers, parce que l’allongement infini des peines nous concerne tous. Comment y parvenir ? Comment briser enfin l’isolement ? Comment les prisonniers peuvent-ils s’organiser pour porter et assumer des revendications collectives ? Comment faire en sorte qu’elles soient entendues ? À l’extérieur, quel écho saurons-nous leur donner ?
Retour de Bosnie
J’étais parti, en revenant de Bosnie-Herzégovine, pour écrire un texte plus complet et plus fouillé sur l’ensemble des aspects que j’avais vus ou réfléchis. Et je me suis retrouvé, après mon retour, à devoir choisir entre l’utilité de proposer rapidement des clefs de lecture sur les derniers événements, et l’idée plus laborieuse d’écrire jusqu’au contentement petitement intellectuel d’une belle production. Heureusement, je fus rattrapé par un bon principe prolétarien : le travail est le premier ennemi du travailleur. Le projet d’une production sans productivité, celle qui abolira l’économie que nous haïssons, m’a ramené à la raison que l’utilité bien partagée d’une activité vaut plus que sa qualité abstraite. Ce récit aura donc une suite si l’utilité s’en fait sentir ; je n’ai pas envie, pour l’instant, de m’enfermer dans une activité qui ne m’est pas aisée d’écrivain.
Vive la révolution A bas le travail
Cependant…, je pense également que des aspects nombreux et intéressant soulevés par ces évènements méritent des développements, également pratiques, qui gagneraient à être plus collectifs.
à lire sur Des Nouvelles Du Front
[Ceuta & Melilla] Une des plus grosse tentative de passage et une voiture bélier
4 mars 2013. Après les assauts menés contre la frontière espagnole à Melilla en février, on apprend de la presse qu’une nouvelle tentative de passage a eu lieu à Ceuta mardi 4 au matin. 1200 migrants se sont lancés à l’assaut de la forteresse Europe. Un premier groupe a tenté de passer par le poste-frontière de Tarajal. Le second, un kilomètre plus loin tandis qu’un troisième groupe rebroussait chemin. Un peu plus tard dans la matinée, un quatrième groupe, d’environ 450 migrants, a une nouvelle fois essayé de passer en force par le poste-frontière.Cette fois personne n’est passé et aucune info n’a filtrée sur d’éventuels blessés.
6 mars 2013. A Melilla, 17 migrants ont tenté de forcer un poste frontière à coup de voiture bélier, mais ne sont pas parvenu à en ressortir avant d’être arrêtés par les flics garde frontière. Une vidéo sur le site d’euronews.
Il tente de mettre le feu à la permanence du candidat FN-RBM
Jeudi 6 mars, vers 23h30, un homme a tenté de mettre le feu à la permanence du candidat FN-RBM Hervé de Lépinau, place du Colonel Mouret, à Carpentras. Ce sont des voisins qui sortaient leurs poubelles qui ont vu les flammes sur la porte d’entrée du local et alerté les services de secours. L’auteur présumé, formellement reconnu par un témoin, a été interpellé par les services de police.
L’ensemble des candidats en lice pour les élections municipales de Carpentras a fermement condamné cet acte.
La provence
Le Fn, le populisme et l’économie
dimanche 9 mars 2014 MARSEILLE à 15 h 30 le Molotov, 3 place Paul Cézanne, 13006
Rencontre-débat Le Fn, le populisme et l’économie Collectif Nosotros, en collaboration avec tantquil. A l’heure où la préférence nationale et la critique de l’ouverture des frontières fait rage, ou des sondages annoncent que plus de 80% des Français attendraient l’arrivée d’un « chef » pour remettre de l’ordre, nous tentons de montrer à quoi et à qui sert le projet économique du nationalisme.
concert de soutien à la caisse de solidarité
Grèce : des nouvelles de la répression en cours…
Début janvier, Christodoulos Xiros, membre de l’organisation révolutionnaire armée « 17
novembre », condamné en 2003 à 25 ans de prison ferme, profite d’une permission de sortie de 9 jours pour se faire la malle. En guise de carte de vœux, il envoie une vidéo et une lettre invitant anarchistes et gauchistes à oublier leurs différents pour créer un front de lutte armée. Cette cavale sert de prétexte aux autorités pour lancer une vague de perquisitions sans précédant dans la mouvance antagoniste, principalement à Athènes et à Thessalonique. Une vague de perquis’ qui touche non seulement les milieux anarchistes, mais aussi les milieux autonomes et ceux d’extrême gauche.
Du 21 janvier au 15 février, pas moins de 41 perquisitions ont lieu à Athènes. Au cours de ces perquisitions, onze personnes sont arrêtées pour des délits mineurs (détention de petites quantités de stupéfiants, possession d’ « armes » du genre gazeuses…). Un mandat de recherche est lancé contre une personne restée introuvable. Sur les onze personnes arrêtées, huit passent en comparutions immédiates et se prennent des amendes, vu qu’il n’y a rien d’autre à leur mettre sur le dos. L’une est relaxée. Deux autres sont renvoyés à des comparutions ultérieures. En ce qui concerne Thessalonique, au moins 30 perquisitions ont lieues entre le 21 et le 30 janvier, dont 4 dans les domiciles des membres de la famille de Xiros. Suite à ces perquisitions, neuf personnes sont également condamnées pour le même genre de délits mineurs. Il est probable que d’autres « violations de domiciles » aient été perpétrées par les chiens de gardes
de l’état, sans que les personnes concernées n’aient rendu publique les faits.
Cette vague de perquisitions, dont la cavale de Xiros n’est qu’un prétexte, est un nouvel épisode de la répression des éléments incontrôlables de la contestation. Dans un contexte de crise économique et de tension sociale, l’une des stratégie de l’état consiste à détourner le mécontentement social en créant des figures de l’ « ennemi intérieur », responsables de tous les maux. Évidemment, les migrants sont les premiers à en faire les frais. Concernant ceux qui ont déjà franchis les frontières, les directives données par le chef de la police national à ses sbires sont très claires : « rendez leur la vie invivable ». Et autant dire qu’il ne s’agit pas d’une parole en l’air. Depuis quelques mois, les opération de rafles vraiment massives se multiplient dans les rues. Une opération qui se nomme « Xenios Zeus », le nom du dieu de l’hospitalité dans l’antiquité grecque! De même que les expulsions collectives de migrants (y compris de réfugiés Syriens) vont bon train (ou avion dans la plupart des cas). La durée de rétention est passée à 18 mois et il n’est pas rare que sur ces 18 mois de rétention, une bonne partie se fasse dans les geôles des comicos, ce qui veut notamment dire sans aucune minute de promenade hors de la cellule. Tout comme il n’est pas rare que les retenus se fassent démonter la gueule dans ces mêmes cellules ou dans les centre de rétention, ou tout simplement tuer dans la mer Égée ou dans la rivière Evros, à la frontière de la Turquie. La situation arrive au point que le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe demande l’ouverture d’enquêtes sur les mauvais traitements infligés aux migrants par la Police aux frontières
et la gendarmerie maritime. Certains états (Grande Bretagne, Suède, Finlande, Norvège, Allemagne, Danemark) avaient déjà suspendu officiellement les expulsions prévues vers la Grèce, après la condamnation du pays par la cours européenne des droits de l’homme en 2011. Dans ce contexte, on ne peux pas vraiment parler de « bavure » quand les gardes-côtes font délibérément chavirer un bateau de migrant, entraînant la mort de douze personnes (enfants compris). Il s’agit plutôt d’un message on ne peut plus clair envers tous les pauvres qui auraient l’audace de vouloir franchir les portes de l’Europe forteresse. Message d’ailleurs assumé ouvertement par ce gouvernement crypto-fasciste, dont le ministre des affaires maritimes couvre les gardes-côtes assassins en indiquant tout simplement que « Personne ne veut ouvrir en grand les portes et octroyer l’asile à tous les migrants qui se présentent dans ce pays ». Un gouvernement qui par ailleurs n’hésite pas à recruter des ordures d’extrême droite, comme l’ex député du partie LAOS (équivalant grec du FN) Thanos Plevris, qui avait publiquement déclaré en 2011 que la seule façon de protéger les frontières du pays c’est de tuer les immigrants qui veulent les franchir. Aujourd’hui, Thanos Plevris est conseiller du ministre de la santé (qui provient lui aussi des rangs du LAOS).
Avec cette répression féroce, l’état alimente un sentiment xénophobe grandissant dans la société grecque. C’est le b-a-ba du « «diviser pour mieux régner » : détourner le mécontentement social des véritables responsables de la misère sociale et économique (eux et leurs copains du patronat) et faire oublier toutes les mesures d’austérité qui passent pendant ce temps là. Ainsi que celles qui viennent soutenir ces mesures d’austérité, en réprimant la contestation sociale. Comme par exemple la réactivation d’une loi de réquisition des travailleurs, qui autorise l’état à envoyer les flics chez les grévistes pour briser une grève. Selon cette loi, si les grévistes réquisitionnés ne se rendent pas à
leur poste de travail, ils peuvent être licenciés et poursuivis juridiquement. Ce fut le cas lors d’une grève des travailleurs du métro et d’une grève de profs. En ce qui concerne la grève des profs, la mesure avait été prise avant même que la grève soit officiellement annoncée.
Alimenter ce sentiment xénophobe permet aussi au passage de rafler des voies parmi les électeurs du parti néo-fasciste « Aube dorée »… Tout en gardant un vernis démocratique !
En effet, l’état ne s’arrête pas à la « menace migratoire ». Il réactive aussi d’autres vieux
épouvantails de la « menace intérieur » , qu’il réprime également. Les anarchistes, la menace d’extrême gauche et toute contestation radicale d’un côté, « Aube dorée » et la menace d’extrême droite de l’autre. Pour les premiers c’est des vagues de perquisitions à tout va dans les milieux contestataires, une répression féroce des opposants à la mine d’or de Halkidiki¹(couvres feux imposé aux villages qui résistent, descentes spectaculaires de flics dans les villages, enlèvements de militants chez eux, mises en préventives sous des accusations d’appartenance à une organisation terroriste et d’attentat à la vie humaine, suite à des faits de sabotage dans le chantier des mines), et même des persécutions contre les maires des communes qui étaient présents lors d’une contestation contre des péages, au cours de laquelle un poste de péage avait été incendié². Les seconds (les fafs) ont aussi droit à leur lot de perquisitions et de répression. Quelques jours après l’assassinat de l’antifasciste P. Fyssas par un membre de «Aube Dorée », l’état et sa justice orchestre une opération fortement médiatique de perquisitions chez les fafs et dans les bureaux du parti. Cette opération se solde par l’arrestation d’une vingtaine de ses membres, parmi lesquels ses dirigeants, et la mise en détention préventive de six de ses députes (dont le président du parti lui-même). Par ailleurs, l’état lance une procédure d’interdiction (toujours en cours) contre « Aube dorée», afin qu’elle soit jugé comme « organisation terroriste ». Les vagues de perquisitions, chez les anarchistes comme chez les fafs, sont médiatisées de manière quasiment identique. Jouer sur la carte des deux extrêmes et mettre les néo-nazis dans le même panier que ceux qui luttent pour la destruction de toute forme de pouvoir, permet encore une fois à l’état de détourner le mécontentement social, en inventant des nouvelles figures de l’ «ennemi intérieur ». Cela lui permet aussi et surtout d’affirmer son rôle de garant de la paix sociale et de la cohésion, dans une société qui se polarise. De réaffirmer sa nécessité, alors même que sa légitimité est fortement contestée.
Faire taire la contestation par la force et par la manipulation médiatique qui alimente la peur, ça ne marche pas à tous les coups ! La Grèce a connu de très fortes mobilisations sociales ces dernières années. Si le mouvement social n’est pas dans une phase ascendante, il n’en reste pas moins quelques pratiques et réflexes qui permettent de faire face aux diverses offensives de l’état. Ainsi, par exemple à Athènes, une assemblée d’immigrés et solidaires d’ASOEE se tient chaque jeudi à la faculté d’ ASOEE. Cette assemblée a commencé en 2012 comme un résultat des luttes communes des solidaires et d’immigrés face aux attaques policières contre le marché à la sauvette sur l’avenue devant la fac. Elle réunis des locaux et immigrés qui tentent de s’auto-organiser ensemble face aux keufs, aux fascistes et à la répression des migrants³.
Dans la même veine, des assemblées de quartier continuent de s’auto-organiser un peu partout dans Athènes . Ces assemblées visent à résister face aux offensives de tous ceux qui nous mènent la vie dure (l’état et les patrons), surtout en temps de crise4. Les assemblées contre les coupures d’eau et d’électricité restent actives. Des assemblées se créent pour lutter pour la gratuité des transports en commun, en essayant de bloquer les contrôles, de plus en plus nombreux et violents5.
Les gens luttent aussi contre le démantèlement de la sécurité sociale et des structures étatiques de la santé. L’enjeu est de garder publique ce qui l’est déjà, en même temps que de mettre en place des structures autogérées et accessibles a tout le monde (des centres d’aide médicale de premier degrés, des pharmacies sociales etc.).
Enfin, des nombreuses manifestations et autres actions s’organisent pour répondre à ces vagues de perquisitions et visibiliser la répression de l’état : manif sauvage devant la maison du chef de la police d’Athènes, manif dans le centre ville d’Athènes, rassemblement devant les maisons des gens perquisitionnés etc.
1 Pour plus d’info http://fr.contrainfo.espiv.net/2013/04/20/skouries-en-chalcidique/ ainsi que https://www.youtube.com/watch?v=eZyDzcni_A8
2 Il s’agit d’une protestation ayant eu lieu le 9/2/2014, réunissant trois communes des frontières nord de agglomération d’Athènes. Il s’agissait d’une action contre un poste de péage qui les obligeait à payer chaque fois qu’ils voulaient sortir de leur commune. Cette protestation fait partie d’une longue liste de protestations et d’actions de sabotages contre les péages ayant eu lieu sur tout le territoire grec les trois dernières années.
3 Pour plus d’info http://immigrants-asoee-fr.espivblogs.net/
4 Quelques informations générales sur les assemblés de quartier ici : http://www.lavoiedujaguar.net/En-Grece-l-Etat-s-effondre-les
5 Le 13 août 2013, un jeune de 19 est assassiné par un contrôleur qui le pousse du bus en marche, parce que le jeune refusait de payer l’amande. En tombant, la tête du jeune passager heurte le trottoir. Cela cause sa mort.
Conseils en manif
Face à la police, face à la justice… réduisons les risques ! Voilà les conseils en manif, en fichier joint vous trouverez la version tract. Et bientôt, il y aura les conseils en garde-à-vue, un peu plus détaillés !
Quelques conseils…
… AVANT LA MANIF
Eviter de venir seul.e. Former des binômes et trinômes (personnes se connaissant et ayant les mêmes objectifs), si possible venir en groupe (plusieurs trinômes regroupés) et fixer un rencard d’après-manif.
Eviter d’amener agenda, carnet d’adresses, tracts et papiers compromettants. Les portables sont utiles, mais attention à les éteindre en cas d’arrestation. De l’eau, de la bouffe et un foulard peuvent être utiles, ainsi que du sérum physiologique. Avoir des chaussures adaptées et éviter de porter des vêtements trop amples. Emporter le nom ou le numéro d’un avocat et de la commission anti-répression (si elle existe).
… PENDANT LA MANIF
Rester mobile et attentif.ve à l’”environnement” : ’’forces de l’ordre’’ (CRS, BAC, RG, …), vidéosurveillance urbaine, … Avec leurs caméras, les flics fichent les manifestant.e.s : se masquer le visage peut être utile.
La première arme de la police c’est la peur. Sirènes, fusées, grenades assourdissantes et intimidations orales sont surtout des techniques de dissuasion. Face à cela, essayer de rester le plus calme possible, même dans les mouvements de foule ; éviter de crier ou de courir inutilement (cela augmente le stress collectif). Ne pas céder à la panique… La peur est naturelle mais on peut apprendre à la canaliser (chanter ensemble, crier des slogans…).
Une charge de police dépasse rarement 50m donc il est inutile de courir plus loin ; il vaut mieux rester groupé.e.s et éviter de laisser des personnes isolées derrière le groupe. La BAC (flics en civil) est là pour interpeller : rester groupé.e.s face à elle, former des chaînes si nécessaire, est un bon moyen d’éviter les arrestations. Les lacrymos sont souvent très localisés, il suffit de se décaler de quelques mètres pour les éviter. En cas de gazage, respirer au travers d’un tissu imbibé d’eau (attention ! si le citron fait du bien sur le coup, l’association citron+lacrymos est très nocive). Les lacrymos collent à la peau et aux tissus, il faut donc éviter de se toucher les yeux et les lèvres avec des mains ou des vêtements contaminés. Se rincer la peau avec de l’eau. Pour les yeux, le mieux est le sérum physiologique, sinon on peut utiliser de l’eau.
Rester toujours attentif.ve aux autres manifestant.e.s : l’entraide est essentielle. Si on voit une arrestation, on peut s’y opposer en agrippant la personne et en interpellant les gens autour. Mais attention, ca ne sert à rien de jouer les zorros… et de se faire serrer aussi.
Si rien ne peut être tenté, demander à la personne de crier son nom et son adresse puis donner ces infos à la commission « anti-répression ». Cela aide à accélérer l’aide juridique (préparer un dossier, discuter de la défense…) et l’ami.e incarcéré.e se sentira moins seul.e. Si on est arrêté.e, crier son nom aux témoins, et éviter les insultes et les coups : l’ « outrage et rébellion » est l’arme judiciaire préférée des flics pour charger un dossier.
… EN CAS DE GARDE A VUE
La durée maximale d’un contrôle d’identité est de 4h ; une garde-à-vue peut durer 24h, prolongeables jusqu’à 48h. Depuis la réforme de la GAV en 2011, il est possible d’exiger la présence d’un avocat dès le début de la GAV et pendant les interrogatoires ; il a 2h pour arriver. Dans les faits, les flics peuvent insister pour commencer sans lui, sous prétexte qu’il n’est pas joignable, et débuter une audition. Ne pas céder sur ce point. Rester vigilant.e même en présence d’un avocat : un avocat peu soucieux de la situation vous conseillera peut-être de tout dire, ou de donner votre ADN…
Demander à voir un médecin (si cette demande n’est pas satisfaite il y a vice de procédure… et ça fait toujours du bien de rencontrer des gens). La loi n’oblige qu’à donner ses noms, date de naissance et adresse, malgré toutes les pressions des flics on a évidemment le droit de ne rien déclarer. Attention, les flics manipulent souvent les Procès-Verbaux, il faut bien les relire avant d’éventuellement les signer. Le fichage génétique (ADN) est un grand pas vers la surveillance totale. Même si refuser de donner son ADN aux flics constitue un délit (un an de prison et 15 000 euros d’amende), les poursuites ne sont pas systématiques, et les condamnations sont souvent légères ( une amende de quelques centaines d’euros…) quand la.e prévenu.e invoque un refus du fichage génétique et est soutenu.e par des associations, syndicats…
En règle générale il vaut mieux demander à reporter la comparution immédiate pour préparer sa défense. On encourt alors le risque d’une détention préventive selon la gravité des faits, le contexte de l’arrestation et les garanties de représentation fournies, d’où l’importance aussi de préparer un dossier solide.
… APRES LA MANIF
Changer ses vêtements si nécessaire, éviter de rentrer seul.e chez soi. C’est souvent bien de trouver un moment pour discuter de la manif et de nos ressentis, et pour s’organiser pour la prochaine !
Attaque
Chronique de la guerre sociale en France
Attaque est un site de perspective anarchiste qui se donne pour but de relayer et de relier entre elles les différentes manifestations d’antagonisme au sein de la société, et contre elle. Les sources sont diverses, elles peuvent varier de la presse bourgeoise à laquelle nous n’accordons que peu de fiabilité en raison des intérêts qu’elle sert et de ses méthodes pour contrer les pratiques d’action directe (déformation/invisibilisation), à divers sites de contre-information où l’on peut retrouver des communiqués de revendication.
L’attaque et la violence, qu’elles soient révolutionnaires et/ou révoltées, sont comprises ici comme partie intégrante de la guerre sociale en cours depuis toujours, qui oppose la domination à diverses formes de tensions vers la liberté. Aucune hiérarchie ne sera établie ici entre les actes de révoltes dits « politiques » et ceux dits « sociaux », nous laissons ces distinctions aux autoritaires d’un côté, et aux anarcho-populistes de l’autre. Nous faisons le choix de ne jamais relayer de textes issus d’organisations, qu’elles soient politiques, gauchistes ou de lutte armée, car nous refusons toute logique organisatrice, aussi « informelle » ou anarchiste soit-elle.
L’exhaustivité étant bien sûr impossible dans le dépossédant megaflux d’informations virtuelles que représente internet, nous invitons qui le souhaite à contribuer en nous envoyant des choses que nous aurions raté, ainsi que des traductions à l’adresse guerresociale [A] riseup.net
la folle journée à Nantes du 22 février
Du son contre la prison
Gafsa/Metlaoui (Tunisie) : des chômeurs saccagent et crament le tribunal, puis le bureau local d’Ennahdha
Tunisie : Des manifestants incendient le tribunal de Métlaoui
TAP | 27 fév 2014 | 15 h 37 min
Des habitants de Metlaoui protestant contre les résultats du concours de recrutement de la Société de l’environnement et du jardinage, relevant de la Compagnie de phosphate de Gafsa (CPG)ont fracturé, mercredi, le siège du tribunal cantonal puis l’ont incendié, détruisant du matériel et des documents et pillant les équipements des bureaux, ordinateurs et téléphones.
La correspondante de l’agence TAP à Gafsa, Le feu a détruit le contenu des bureaux du service pénal du tribunal, ainsi que les documents d’autres bureaux, notamment les plaintes et les actes de décès.
Pour leur part, les armoires du service civil de ce tribunal ont été fracturées et pillées, et les réseaux d’électricité et d’eau potable ont été détruits, alors que des dégâts ont été commis dans les salles d’audience et dans le bureau du juge cantonal. Des protestations ont éclaté, il y a deux jours, parmi les postulants qui n’ont pas réussi au concours de la société de l’environnement et du jardinage, pour le recrutement de 1120 chômeurs de Metlaoui sur un total de 2716 places pour toutes les délégations du gouvernorat.
Le procureur-adjoint du tribunal de première instance de Gafsa, Abdesselam Mekki, a déclaré à la correspondante de la TAP qu’une « instruction a été ouverte », ajoutant que « le juge d’instruction et un représentant du ministère public de Gafsa se sont rendus, jeudi, sur les lieux, pour évaluer les dégâts, réunir les preuves et enquêter pour dévoiler les auteurs ».
Selon des témoins oculaires, les protestataires avaient « bloqué, mercredi après-midi, la route principale de la ville de Metlaoui, enflammé des pneus et des bennes à ordures, avant d’attaquer et d’incendier le tribunal et le bureau local du parti Ennahdha situés tout près ». Pourtant, il était possible de présenter des recours, surtout que ces résultats sont préliminaires, d’après les communiqués du ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, et celui de l’Industrie, de l’Énergie et des mines.
D’autre part, les cours étaient toujours suspendus, jeudi, dans les établissements scolaires, alors que la situation paraissait calme et normale, dans la ville de Metlaoui. Les commerces ont ouvert et le trafic routier est normal. Le transport du phosphate et des voyageurs par voie ferrée était bloqué, mercredi, à cause du sit-in observé par des groupes de protestataires qui n’avaient pas réussi au concours, au niveau de la ligne ferroviaire N°15 reliant Metlaoui, Gafsa et les site de production de phosphate.
Metlaoui : Un local d’Ennahdha et un tribunal partiellement incendiés
AFP, 27/02/2014 13h22
Le local du parti islamiste tunisien Ennahdha à Métlaoui (centre) et un tribunal ont été partiellement incendiés dans la nuit de mercredi à jeudi par des manifestants protestant contre les résultats d’un concours de recrutement, selon un correspondant de l’AFP.
Il s’agit de la deuxième nuit consécutive de violences dans cette ville de la région de Gafsa, au centre de la Tunisie, stratégique pour ses mines de phosphates, mais où la grogne sociale due du chômage dégénère régulièrement. Dans la nuit de mardi à mercredi, un poste de police avait déjà été incendié.
Les heurts ont éclaté après que les autorités ont commencé à annoncer les résultats du concours de recrutement d’une société publique travaillant dans le secteur de l’environnement, dont les protestataires s’estiment injustement écartés.
Jeudi matin la tension restait palpable à Métlaoui selon le journaliste de l’AFP, et la police ainsi que des unités de l’armée se sont positionnées devant des installations publiques.
De nouveaux résultats sont attendus dans les jours à venir, ce qui laisse craindre de nouvelles violences. Les résultats de ce type de concours déclenchent régulièrement des affrontements entre candidats malheureux et policiers.
La région de Gafsa est stratégique pour la Tunisie en raison de ses mines de phosphates, mais reste parmi les plus pauvres du pays. Elle avait été le théâtre en 2008 d’une insurrection nourrie par la pauvreté et réprimée dans le sang par le régime déchu, à Redayef notamment.
Depuis 2011, la production minière y est à 30% de ses capacités en raison des nombreux mouvements sociaux et malgré l’embauche de milliers de personnes pour tenter de juguler la grogne sociale.
La révolution tunisienne a été largement nourrie par la misère et le chômage. Mais déstabilisée par une crise politique et des conflits sociaux à répétition, l’économie de la Tunisie n’a pas redémarré, si bien que le chômage touche toujours plus de 15% de la population active et plus de 30% des jeunes diplômés.
DANS LE MONDE UNE CLASSE EN LUTTE FEVRIER 2014
Une publication sur les luttes sociales dans le monde…. ECHANGES ET MOUVEMENT, BP 241, 75866 PARIS CEDEX 18, France. Site Internet :http://www.mondialisme.org
LUTTES DE CLASSE ET LUTTES POLITIQUES
Notamment depuis le sud-est asiatique jusqu’au Sénégal, dans une large bande autour de l’Equateur¸ dans le Moyen-Orient jusqu’à l’Ukraine, monde est à feu et à sang. Cela concerne les pays en développement comme ceux restés dans une telle dépendance que l’on ne parle même pas de développement.
On rencontre aussi bien des affrontements armés dans une véritable guerre civile comme en Syrie ou autour du Soudan, ou en Centre-Afrique, qu’une guérilla récurrente comme en Afghanistan, en Irak, en Lybie ou au Liban, ou dans des manifestations imposantes avec occupation de lieux publics, un peu partout mais surtout présentement en Ukraine ou en Thaïlande, récurrentes mais toujours violemment réprimées.
Dans la grande majorité de ces conflits, il s’agit de luttes strictement politiques pour la conquête ou le partage du pouvoir, prenant des aspects ethniques et/ou religieux souvent sous-tendus par les rivalités entre grandes puissances ou l’influence d’une ex-puissance coloniale. Parfois, dans les pays où existe une classe ouvrière conséquente, comme en Tunisie, en Egypte ou récemment au Cambodge, la lutte ouvrière peut servir d’appoint à ces forces politiques — très temporairement –comme cela s’est vu souvent dans maintes « révolutions bourgeoises » dans le passé.
De toutes les façons, que la classe ouvrière soit intervenue ou qu’elle soit restée en marge, une fois ce conflit politique « résolu » pour un temps, tout ce que les uns et les autres demandent aux travailleurs c’est de reprendre le travail, de rentrer dans les rangs, et de travailler aux conditions imposées par le capital via le gouvernement en place, détenteur du pouvoir de répression sociale, dans un monde toujours fait de surexploitation et d’austérité pour l’immense majorité de la population.
Ces luttes politiques n’ont en fait rien à voir avec les luttes sociales, avec la lutte de classe, sauf à perpétuer sous une forme différente — certains appellent même ce changement de forme de « révolution » — la domination du capital.
La guerre sociale, la guerre de classe, c’est tout autre chose. Elle englobe tous les travailleurs qui luttent contre le quotidien de leur exploitation dans toutes ses formes, individuelles autant que collectives, avec les limites du rapport de forces du moment. Ces formes vont de la récupération individuelle de la marchandise-temps de travail et/ou du produit du travail, à la récupération collective de ce temps de travail dans la grève, de l’espace de travail par l’occupation de l’appareil de production dans les tentatives d’autogestion, de la marchandise vendue pour se faire du fric… Parfois cela va beaucoup plus loin par une généralisation de toutes ces luttes et alors, la lutte sociale, la lutte de classe devient ouvertement politique. Mais la lutte de classe concerne aussi tous les exclus, cette force de travail en réserve qui tente de s’approprier des miettes du festin capitaliste, qui récupère tout ce qui dans ce système est marchandise : les squats avec la propriété privée, les SDF avec l’espace public, les chômeurs qui peuvent tenter de rompre les encadrements stricts des « avantages sociaux », la récupération directe dans les temples de la distribution, etc.
Tout cela fait partie de la lutte de classe et dans le monde, les travailleurs et laissés-pour-compte sont de plus en plus nombreux (depuis 1990, selon les chiffres officiels, le nombre de ceux qui vendent leur force de travail a été multiplié par trois, et encore en ne prenant pas en compte le fait que la moitié de la population active mondiale travaille « au noir » ; cette croissance ne se reflète pas dans la part des salaires dans les revenus mondiaux : de 1970 à 2010, malgré l’accroissement du nombre d’actifs salariés, cette part est passée de 66 % à 60% de ces revenus, ce qui signifie une intensification des conditions d’exploitation du travail).
Cela veut dire que le prolétariat représente une force placée dans des conditions de base identiques (même s’il y a des différenciations énormes dans ces conditions réelles), et que le capital exige de lui toujours plus pour en concéder toujours moins.
C’est pour tout cela que nous consacrons ces pages, principalement à la lutte de classe, et non aux rivalités politiques bourgeoises de tel ou tel camp., à tenter d’analyser comment les luttes se déplacent et se développent face à la domination et à la répression. Nous pouvons espérer que ces luttes finiront par déplacer les frontières de classe au point de les effacer et de liquider, avec le système capitaliste, tous ceux qui en assurent le fonctionnement.
L’IMAGINATON AU POUVOIR
BRESIL – 18/01/2014 – Comme ailleurs, la répression a bloqué l’extension des occupations d’espaces publics (voir précédents bulletins). Déjà, autour de Noël, le pillage des centres commerciaux jouxtant les banlieues avait entraîné une plus grande répression. Ce qui suit peut paraître une réplique organisée.en utilisant habilement les structures du système.
Organisés sur le réseau Facebook, les Rolezinhos, ou rassemblements éclairs de protestation, peuvent regrouper jusqu’à 8 000 participants. On trouve ainsi 1 000 activistes au supermarché JK à Sao Paulo (contre les discriminations), 6 000 de nouveau à Sao Paulo pour occuper le Shopping Itaquera proche d’un faubourg pauvre. En général, les Brésiliens impliqués dans ces mouvements originaux se mobilisent contre le racisme, les inégalités sociales, etc. Ils sont imprévisibles et échappent à tout contrôle. Il est difficile de les contrer car aucun commerce ne peut empêcher les clients supposés d’entrer, et il est difficile aux flics d’intervenir. Bien sûr, de tels rassemblements dans les rayons des supermarchés et boutiques des centres commerciaux entraînent de fructueuses récupérations de marchandises.
Le mouvement a pris une telle ampleur que le gouvernement s’est réuni d’urgence. Peut-être, à l’imitation de ce qui est projeté en Espagne ou mis en œuvre en Egypte, pénalisera-il sévèrement l’utilisation des réseaux sociaux pour convoquer de tels rassemblements festifs protestataires.
ARGENTINE
Ce qui s’est passé en Argentine le 10 décembre 2013 illustre parfaitement le fait que lorsque les forces du contrôle social (police et armée) sont dans l’impossibilité temporaire de remplir leur fonction, la marmite explose et les premiers actes sont la récupération et la réappropriation de la marchandise. C’est valable pour les catastrophes naturelles (ouragan Katrina, tremblement de terre, tsunami par exemple), ou avec les dysfonctionnements du capital (pannes géantes d’électricité, explosions atomiques ou autres).
Ce qui déclenche cette situation en Argentine, c’est la grève des flics pour les salaires, imprudemment annoncée à l’avance ; cette grève débute à Cordoba, la deuxième ville du pays, et s’étend dans 17 des 23 provinces; dès que la nouvelle de la grève a été connue, des gangs se sont constitués pour faire des raids sur les supermarchés. De véritables bandes ont déferlé alors, venues des bidonvilles, qui ont pris d’assaut tous les commerces sans distinction et parfois des habitations cossues. Pain béni en cette période d’inflation ; 1 900 magasins auraient été vidés de toutes marchandises, comme avec un aspirateur géant. Certains commerces ont tenté de se défendre avec les gardiens ou individuellement. Dans certaines provinces, à la dernière minute, on a envoyé les gendarmes ou on a doublé le salaire des flics. Ce qui fait que les retardataires se sont trouvés coincés ou que des tentatives de récupération ont tourné court parce que tout était bien gardé. En une semaine, on a compté 12 morts et des centaines de blessés (certains dans le bris des vitrines).
Si ce mouvement s’est terminé souvent dans la douleur parce que les flics , ayant obtenu une rallonge de 50%, ont repris leur travail de répression, cette concession était plus que nécessaire en face de ce qui se profile dans la montée d’un puissant mouvement social.
Le pays se trouve pris dans une tourmente économique qui est chaque jour plus aigüe L’inflation dépasse 30%, les produits de base ont disparu des supermarchés, les commerçants n’affichent plus les prix qui s’envolent au jour le jour. Le billet de métro est passé de 2,50 pesos à 6 pesos, des coupures d’électricité peuvent durer plusieurs semaines, la monnaie nationale, le peso, est abandonnée pour un marché noir du dollar. De nouveau comme en décembre 2001 des concerts de casseroles (cacerolazos) sont réapparus contre les coupures d’électricité. Est-ce le début d’un mouvement global de protestation ?
COREE DU SUD
– *La baisse des taux d’intérêt et la relance de la consommation ont entraîné la délivrance de cartes de crédit et ont causé un bond de 184 % de l’endettement de 20 % de la population. 300 000 foyers ont dû avoir recours à un fonds spécial « Happiness fund » (sic) pour les aider à gérer leurs dettes. Parallèlement, la multiplication de ce crédit facile et peu encadré a favorisé une énorme fraude sur les cartes de crédit, ce qui a provoqué une panique pour les titulaires de compte devant par milliers entamer des démarches pour récupérer leurs avoirs; les queues devant les guichets des banques ont parfois tourné à l’émeute
*« Comment allez-vous ces jours-ci ? » : cette simple question, lancée par un étudiant en économie sur les murs de l’université et sur Facebook, en tête d’un texte dénonçant la corruption et l’austérité, est devenue à l’insu de son auteur le ralliement de toutes les oppositions, notamment dans les milieux de l’éducation, au point que le ministre concerné en a fait interdire l’affichage et la mention dans les établissements scolaires. Il s’y est souvent ajouté la phrase suivante : « N’avez-vous pas de problèmes à ignorer les questions politiques ? » Le1er janvier, un homme s’est immolé par le feu pour demander la démission de la présidente Park avec un panneau où l’on pouvait lire : « Comment allez-vous ces jours-ci ? »
MEXIQUE
– La méthode expéditive. Depuis le 28 août dernier, plusieurs chauffeurs de bus de Ciudad Juarez ont été exécutés de sang-froid par une femme qui se revendique « Diana, la chasseresse des chauffeurs de bus ». Dans un message, elle se veut vengeresse des assauts sexuels sur les femmes qui rentrent tard de leur exploitation dans les usines de la Maquiladora. La ville a longtemps détenu le record des meurtres et des viols de femmes, ouvrières pour la plupart (au minimum 800 dans les vingt dernières années). Depuis, des chauffeurs de bus abandonnent leur emploi.
LA GREVE ET RIEN D’AUTRE
INDE Quelques grèves locales parmi bien d’autres, rien qu’en janvier 2014 :
*Maharastra : les enseignants manifestent pour les salaires et l’intégration de temporaires. Une grève pour les mêmes revendications en mars 2013 a duré quarante-deux jours ;
*Tamil Nadu : 800 travailleurs des transports publics manifestent pour le paiement de primes ;
*Kerala : les travailleurs d’une carrière de granit occupent le site pour obtenir l’arrestation du propriétaire qui a tiré au fusil sur 2 syndicalistes, ils demandent l’application du minimum légal des salaires.
ILES FIDJI
–* 400 travailleurs du Sheraton Hotel et d’autres établissements hôteliers se mettent en grève le 31 décembre contre des suppressions de postes. Les directions cèdent après quatre heures, avec promesse de discussion.
CANADA
– *5/01/2014 – Les 160 travailleurs de la firme Horizon Plastics International à Cobourg dans l’Ontario n’ont pas besoin de se mettre en grève suite à leur refus des propositions patronales concernant le renouvellement du contrat collectif qui impose notamment l’emploi de temporaires et le blocage des salaires : le patron décide d’un lock-out, une fermeture temporaire.
ETATS-UNIS
– *Le plus grand fabricant de conteneurs des USA, Silgan Containers Corporation, possède 3 usines à Modesto en Californie mais chacune sous des statuts différents, et avec des contrats de travail distincts. Dans l’une d’elles, le renouvellement du contrat collectif permet au patron de tenter d’imposer le blocage des salaires sur deux ans. Le refus des 100 travailleurs de se plier à ces conditions entraîne le lock-out patronal.
*9/10/2013 –Les chauffeurs de bus scolaires de la ville de Boston ( une compagnie privée filiale de Veolia) avaient récemment accepté un nouveau contrat collectif . Mais , pour compenser les concessions sur ce contrat, Veolia a tant modifié les conditions de travail ( limitation des pauses, , introduction de GPS d’espionnage ,etc..) que des réclamations ont été introduites, en vain, devant le National Labor Relations Board. De guerre lasse les chauffeurs ont décidé le matin du 8 octobre « qu’assez était assez » et ont entamé sur le champ une grève sauvage, laissant les 38 000 enfants de la ville bloqués à la maison. Le mouvement a été désavoué non seulement par les autorités de la ville mais aussi par le syndicat (United Steelworkers) qui a ordonné la reprise du travail immédiate. Quand un des dirigeants du syndicat tenta de haranguer en ce sens un groupe de 100 chauffeurs dans un dépôt, il fut si hué qu’il dut abandonner. Sur l’annonce de pourparlers et l’abandon de toute sanction, la reprise fut totale le jeudi 10 octobre.. Mais , la grève finie et la rapport de forces rentré dans la « normale », les promesses patronales s’envolent: début novembre 5 chauffeurs étaient suspendus en attente de procédure interne et deux déjà licenciés pour leur participation active à la grève.
EUROPE
–* Décembre 2013 – Un peu partout où Amazon est implanté, des documents révèlent les conditions de travail où se combinent les techniques les plus modernes et des conditions d’exploitation du début du capitalisme. Comme il est imposé à ces esclaves modernes de garder le silence sur ce qu’ils subissent au travail sous peine de renvoi immédiat (délation encouragée), le seul moyen d’en savoir plus est de se faire embaucher, ce qui est facile vu le turnover et l’emploi de temporaires saisonniers. Ce que des journalistes ont fait tant en France qu’en Allemagne ; dans l’ouvrage En Amazonie : infiltré dans « le meilleur des mondes » est décrit ce que l’auteur J.B Malet a vécu pendant une année avec les 1 200 exploités du centre de Montélimar. En Allemagne, le syndicat des services Verdi a cru pouvoir lancer le 16 décembre des grèves dans les 3 centres allemands d’Amazon, deux semaines avant Noël, pour plus d’efficacité. Les débrayages ont été limités et séparément dans les 3 sites de Bavière, Hesse et Saxe, bien que sur 2 sites la grève ait duré une semaine. Les revendications portent sur les salaires (actuellement de 9,55 euros l’heure) et sur moins de précarité. Le problème est qu’à côté des 9 000 travailleurs permanents, sont exploités 14 000 saisonniers (avec une majorité d’immigrés).
Cette situation explique le succès très limité de la grève (1 155 permanents grévistes sur 9 000). On peut rapprocher ces difficultés de lutter à d’autres secteurs, où l’on retrouve une majorité de précaires et un important turnover comme par exemple dans la restauration rapide (voir précédents bulletins sur des tentatives de luttes dans ce secteur aux USA, ou il y a des années en France).
HAÏTI
–* Depuis décembre 2013, constantes manifestations pour des augmentations de salaires.
COREE DU SUD
– *Le gouvernement ayant exprimé son intention de privatiser la seule ligne TGV du pays, le syndicat majoritaire Kctu considérant que c’est l’amorce d’une privatisation entraînant un durcissement des conditions de travail lance la grève illimitée de tout le réseau ferré Korail (Korean Rail), le 9 décembre 2013.
Le 22 décembre, 4 000 flics sont lancés contre le siège central du Kctu défendu par 800 cheminots : 130 arrestations. Le 28 décembre, le Kctu lance une grève générale d’une journée pour dénoncer la répression syndicale et le droit à la grève pour les cheminots, la leur ayant été déclarée illégale. Mais, même si elle réunit plusieurs dizaines de manifestants à Séoul et dans les grandes villes du pays, elle n’est pas un succès et cela accentue la démobilisation de la grève de Korail.
Fin décembre, après trois semaines de grève, 8 000 cheminots sur 35 000 sont encore en grève et 1 110 grévistes « d’origine » ont repris le travail, 7 900 ont été suspendus, des menaces de licenciements pèsent sur 186 d’entre eux, 25 font l’objet de poursuites judiciaires. Seuls 2 ont été arrêtés, les autres ont plongé dans la clandestinité.
Ce qui fait que le 30 décembre, le Kctu décide la fin de la grève, une fin peu honorable car basée uniquement sur la promesse de la constitution d’une commission parlementaire , soi-disant contre toute privatisation, incluant les partis d’opposition mais pas les syndicats. Cela sonne pourtant comme une défaite car les poursuites judiciaires sont maintenues, des sanctions menacent 490 cheminots et de juteuses compensations financières sont demandées au Kctu par Korail sous le prétexte que la grève était illégale car politique, ne concernant pas les conditions de travail.
FRANCE
– *1/01/2014 – Début de la grève totale et illimitée des marins de la SNCM, une des compagnies assurant le trafic entre le continent et la Corse. Une des raisons de la grève réside dans les difficultés financières de la compagnie, soumise à la concurrence déloyale de l’autre compagnie assurant les mêmes liaisons — Corsica ferries, battant pavillon italien et pouvant recruter des marins étrangers sous-payés.
La grève très suivie bloque une partie du trafic voyageurs et surtout le trafic Fret qui ne peut trouver place dans les navires de Corsica, qui de plus sert d’abord ses clients réguliers. D’où une grève des routiers de Corse qui bloquent les ports et interdisent tout trafic de camions avec le continent. La grève se termine par l’acceptation d’une suppression de 500 postes par départs volontaires, la commande de 2 navires supplémentaires et une participation de l’Etat. Aussi, promesse est faite de contraindre les compagnies Corse-Continent à se mettre sous pavillon français et d’avoir un équipage soumis aux lois du travail françaises.
Bien qu’on n’en parle guère (consigne du silence sur le climat social), rien qu’en décembre 2013 et janvier 2014, de multiples grèves localisées, notamment lors de la fermeture d’usines (et on en oublie ou elles ne sont pas médiatisées)
*17/12/2013 – Journal gratuit 20 minutes – Grève contre la suppression de 13 postes sur 213 journalistes.
*22/12/2013 – Grève des sages-femmes depuis deux mois mais elles sont assignées pour assurer la continuité des soins. La grève ne se traduit que par des refus de la paperasserie administrative et des manifs.
*1/01/2014 – Grève de la SNCM (voir article).
*5/01/2014 – Aéroport de Roissy – Menacés par un plan de licenciement, les employés au sol de Lufthansa France débraient du 3 au 6 janvier contre la suppression de 199 postes sur 262. Nouvelle grève envisagée.
1*4/01/2014 – Grève nationale d’une journée sur les différents sites de Sanofi sur appel syndical pour les salaires, la transformation des CDD en CDI.
*15/01/2104 – Grève des pompiers de Saône-et-Loire sur les horaires de travail et les conditions de logement.
*17/01/2014 – République du Centre : grève avec occupation contre la suppression de 60 postes sur 250 et pour l’augmentation des indemnités de départ. Le 2 janvier, séquestration de 2 dirigeants pendant vingt-quatre heures.
*22/01/2014 – Grève de 320 journalistes du Parisien contre la réduction du remboursement des frais.
*23/01/2014 – Montauban : grève de Sedimap et de sa filiale Teamtec (géolocalisation) de 25 travailleurs contre la menace de liquidation de l’entreprise et une reprise avec licenciements. Le même jour, débrayage pour les salaires impayés à Sanimat Santé. Agitation également dans le secteur hospitalier de la ville.
GRANDE BRETAGNE
—*4/2/2014—grève de 48 h du réseau du métro londonien, lancée , après vote majoritaire, par le syndicat Rail Maritime Transport Union (RMT) très suivie, entraînant un chaos total. Ceci malgré le syndicat des conducteurs ASLEF qui a autorisé ses membres traverser les piquets de grève et la tentative d’embaucher des jaunes pour briser la grève. Le mouvement veut s’opposer à la suppression de 1 000 postes et la fermeture de 350 points de vente de billets.
ARGENTINE
– *7/01/2014 – Neuquen – Les infirmières des hôpitaux locaux en grève depuis le 26/12, bien que sous contrainte de la réquisition, n’en font qu’un minimum, manifestent et bloquent les routes, pour une augmentation des salaires comprise entre 30 et 40 %. Les directions tentent de briser la grève avec l’emploi de retraités et de jeunes recrues. Réplique : menace de 500 d’entre elles de démissionner si les revendications ne sont pas satisfaites.
ITALIE
– *29/01/2014 -– Usines Electrolux , firme suédoise des appareils électriques: grève contre une tentative de baisse des salaires de 130 euros ( 8%) pour les 5 700 ouvriers de ses quatre usines d’Italie.qui gagnent en moyenne 1 400 euros mensuels Mais en fait la baisse des salaires serait plus importante ( près de 40%) car les horaires des équipes serait modifiés et la prime d’ancienneté supprimée., ce qui aboutirait à des salaires moyens entre 7 et 800 euros mensuels Le but serait d’aligner les coûts de production sur ceux des travailleurs polonais de la firme. Dans le passé, Electrolux a déjà fermé des usines en Allemagne et en France pour les mêmes raisons. Grèves et manifestations n’ont, jusqu’à présent pas changé grand-chose.. L’Italie a pourtant en Europe occidentale les salaries horaires les plus bas.
VENEZUELA
– 7/10/2013 –Ciudad Guayana. Orinico Steelworks (SIDOR), la plus grande aciérie du pays, entreprise d’Etat Inflation, manque de produits de première nécessité et la disparition de Chavez ont fait que les 14 000 travailleurs n’ont plus de complexes pour entrer en lutte. La grève commence à la mi-septembre par des protestations de la base qui débraient alors que des négociations traînent pour le remplacement du contrat collectif expiré depuis trois ans et qu’il semble que les primes annuelles ont été minimisées. Une partie des syndicats soutient la grève mais une autre fraction syndicale prenant position pour le gouvernement et les dirigeants de l’usine .tente de persuader les ouvriers de reprendre le travail. Pour le moment, il ne s’agit que de joutes oratoires lors de meetings distincts mais comme le déclare un travailleur « On ne comprend rien à tout ça » d’autant plus que tout le monde se réclame de Chavez. Son héritier au pouvoir Maduro accuse des ingérences étrangères , déclare la grève illégale et somme les grévistes de reprendre le travail immédiatement sous la menace de mesures énergiques. La grève cesse le 2 octobre avec un accord entre la direction et un des syndicats sur la montant des primes considérées. Mais il faut croire que cet accord n’a pas doné satisfaction car une nouvelle grève de 48 h éclate les 8 et 9 novembre 2013 avec les mêmes revendications.
MANIFESTATIONS, OCCUPATIONS TOURNANT A L’EMEUTE
AFRIQUE DU SUD
– *13/01/2014 – Une manifestation des habitants de Brits, dans la banlieue de Pretoria, privés d’eau depuis plusieurs mois, tourne à l’aigre et est attaquée par les flics : 2 morts par balles, 2 autres morts jetés d’une voiture de police.
*28/01/2014 – Relela près de Tzaneen (Limpopo) : la découverte des cadavres d’une femme et d’un enfant déclenche une chasse aux suspects : relâchés par la police, leurs habitations sont incendiées. 1 500 manifestants attaquent le commissariat avec des pierres et des cocktails Molotov : 15 flics blessés, 19 voitures incendiées. Les flics tirent, 3 tués, 9 arrestations.
TUNISIE
– *14/4/2014 – L’instauration d’une taxe sur les transports privés et professionnels dans la région déclenche blocages routiers et manifs à Feriana, dans la région de Kasserine. Des centaines de manifestants attaquent les perceptions, les commissariats, les banques et les bâtiments municipaux, et les incendient. Des mouvements semblables à Thala et Meknassy (région de Sidi Bouzid). Le 18 janvier à Ksar (Gafza), des chômeurs bloquent la voie ferrée servant à l’acheminement des phosphates, pour avoir un emploi.
TURQUIE
– *27/12/2013 – Enlisé dans des scandales à répétition et l’importance de la corruption, le gouvernement proche des Frères musulmans doit faire face à une contestation d’autant plus importante que la crise frappe de plein fouet les conditions de vie ; les manifestations récurrentes sont durement réprimées : des blessés et 31 arrestations.
VIETNAM
– *9/01/2014 – Une explosion de violence qui illustre les tensions sociales. Personne ne peut expliquer correctement cette explosion soudaine sur un site de construction sauf qu’elle se produit sans aucun doute dans le cadre d’une violence de classe latente. Le Vietnam est le lieu privilégié de délocalisations depuis la Chine des firmes de l’électronique (Samsung, Intel, Nokia, entre autres). Sur le chantier de construction d’une usine géante pour Samsung, dans la province de Thai Nguyen, un de ces travailleurs anonymes veut entrer par une porte interdite : il est pris à partie par un garde et roué de coups. Aussitôt, tous les travailleurs qui ont eu à subir de telles exactions se solidarisent, attaquent les gardes avec des briques et des pierres abondantes sur ce chantier, incendient leurs motos, détruisent le matériel et leurs logements provisoires. La chasse aux gardes dure plusieurs heures puis s’arrête. On ne sait rien de la répression.
ALGERIE
– *28/12/2013 – Émeutes récurrentes dans tous les quartiers d’Alger et ailleurs en Algérie ; dans le quartier d’el Hamiz, barrages routiers contre une attribution préférentielle de logements sociaux. A El Hamir, contre l’état déplorable du réseau routier, à Cheraraba, Ain el Malha, des affrontements témoignent d’une tension constante, à Baraki dans 2 bidonvilles ces affrontements durent cinq jours, à Douera : barrages routiers.
CHINE
– *Entre le 1/12/13 et le 7/01/2014, la Chine a connu 72 grèves pour des salaires impayés, notamment dans le bâtiment, chez les sous-traitants. Ces confits sont encore plus fréquents à l’approche du Nouvel an chinois le 31 janvier, le retour au pays en cette occasion devant se faire avec de quoi payer festivités et cadeaux.
*23/12/2013 – À Wenzhou, les travailleurs d’une usine de chaussures en faillite manifestent dans la ville pour le paiement des salaires.
*2/01/2014 – Zhengzhou, des centaines de migrants se mettent à genoux pendant des heures sur le site de construction pour le paiement de mois de salaires.
*3/01/2014 – Lanzhou. 6 travailleurs montent sur le toit d’un bâtiment de 9 étages et menacent de sauter dans le vide si les 32 000 euros qui leur sont dus ne sont pas payés immédiatement.
CAMBODGE
–* Depuis plusieurs mois, les ouvriers du textile (650 000 dont 400 000 œuvrant pour des multinationales) manifestent ou font grève pour obtenir une revalorisation des salaires (actuellement de 64 euros mensuels avec une promesse de 76 euros en avril 2014). Les syndicats, devant la montée des arrêts de travail, se trouvent contraints de lancer une grève générale le 24 décembre 2013. Cette agitation est en partie exploitée par le parti d’opposition, le Parti national du secours cambodgien. Le 2/01/2014, le gouvernement offre 80 euros immédiatement si le travail reprend. Mais manifestations et grèves continuent. Le 2 janvier, les flics virent les ouvriers d’une usine occupée dans la banlieue de la capitale.
*Le 3/01/2014, la police tire à balles réelles sur une manifestation des travailleurs du textile à Phnom Penh, armés de pierres et de cocktails Molotov : 5 morts et au moins 12 blessés sérieux, 23 arrestations. Le 4 janvier, les flics virent les manifestants de la place de la Liberté à Phnom Penh et quadrillent toutes les rues de la ville avec blindés et mitrailleuses. Les manifestations sont interdites et les activistes syndicaux doivent entrer dans la clandestinité pour échapper aux arrestations. 23 de ceux-ci arrêtés sont tenus au secret. Le 8 janvier, après quinze jours de grève, le syndicat ordonne la reprise du travail. Le 15 janvier, les travailleurs des 500 usines de confection commencent à reprendre le travail mais beaucoup d’entre eux sont retournés dans leurs villages. La grève ne cesse pas pour autant : le même jour, 2 usines distinctes sont occupées pour le paiement des salaires et des jours de grève.
De toute évidence, le gouvernement entend maintenir de bas coût de la force de travail pour rester un des lieux privilégiés de la délocalisation de Chine. Le réservoir de main d’œuvre est effectivement attrayant : 80 % de la population vit dans les campagnes d’une agriculture de subsistance, avec un taux de pauvreté dépassant 32 %. La plus grosse partie des entreprises délocalisées étant aux mains de firmes coréennes, et la Corée du Sud envisageant d’en faire un lieu de délocalisation pour l’électronique, le gouvernement coréen a observé les grèves avec une attention particulière. L’ambassade de Corée a encouragé le gouvernement à « comprendre la situation et à agir rapidement ». On aurait même identifié des agents de sécurité coréens (peut-être des militaires) dans les patrouilles qui « assuraient la sécurité » dans la zone industrielle de Canadia Industrial Park.
De leur côté, les employeurs ont félicité le gouvernement en ces termes : « Nous sommes convaincus que si les travailleurs voient que le gouvernement maintient la loi et l’ordre, ils reprendront le travail dans quelques jours », ce que confirme le gouvernement en maintenant l’interdiction de manifester jusqu’à ce que « la sécurité et l’ordre public soient rétablis ».
ITALIE
– *31/12/2013 – D’après l’Institut de statistique, la pauvreté en Italie a atteint son plus haut niveau depuis seize années. Le revenu mensuel moyen de 991 euros a diminué de 6 % dans le nord et de 26 % dans le sud ; le taux de chômage de 12,5 % atteint 41 % chez les jeunes.
BANGLADESH
– *Décembre 2013-Janvier 2014 – Dans les précédents bulletins, nous avons déjà évoqué le mélange de 2 luttes parallèles : l’une politique avec des affrontements violents entre les 2 principaux partis, la ligue Awami proche de l’hindouisme et le Bangladesh national party (BNP) d’obédience musulmane, l’autre comme un conflit social permanent des travailleurs surexploités, notamment dans l’industrie textile.
Les dernières élections, le 5 janvier dernier, ont ramené au pouvoir la ligue Awami mais après une longue campagne électorale marquée par une répression politique accrue (notamment, la pendaison d’un chef musulman jugé responsable des atrocités commises dans la guerre d’indépendance de 1973 – entre 500 000 et 3 millions de tués), et une violence inégalée, non seulement dans des journées de grèves nationales politiques (les « hartals » qui, en 2013, ont laissé 300 morts) mais aussi dans l’incendie des bureaux de vote (100 écoles ont été incendiées).. (507 bureaux de vote n’ont pu fonctionner et seulement 25% des inscrits ont participé au vote). De toute façon, les deux partis représentent seulement deux fractions distinctes de la bourgeoisie et sont également hostiles à un mouvement syndical indépendant de la classe ouvrière ou des masses paysannes; alors qu’ils sont au pouvoir, les uns et les autres n’ont jamais hésité à utiliser la police et l’armée et à faire tirer sur toute manifestation sociale d’une révolte contre une condition misérable.
Parallèlement, les grèves dans le secteur textile succèdent aux grèves et on ne peut que citer les plus récentes :
*11 novembre, des milliers de personnes manifestent dans la banlieue de Dhaka et les patrons ferment 100 usines du secteur par crainte de contagion. La répression laisse 30 blessés ;
*14 novembre, un accord conclu avec le patronat porte les salaires dans le secteur de 32 euros mensuels à 54 euros ; c’est largement insuffisant et de nouvelles grèves éclatent aussitôt ;
*26 novembre, l’usine de Multifibers Ltd à Gazipur (banlieue de Dhaka) est en grève pour demander la parité avec les autres usines du groupe, d’autres usines des environs débraient aussi ;
*1er janvier 2014, toujours à Gazipur, l’usine de Quater Synthetics est en grève à cause d’une promesse antérieure d’augmentation de 11 euros mensuels) par mois non tenue (les salaires sont compris entre 36 et 38 euros) ;
*9 janvier 2014, dans la zone d’exportation coréenne du port le plus important pour les exportations, Chittagong, 5 000 travailleurs d’une usine de chaussures débraient après des rumeurs sur la suppression de pourtant médiocres avantages sociaux (les salaires sont en moyenne de 40 euros mensuels). L’usine occupée est saccagée. Par crainte de voir le port bloqué, la répression monte d’un degré, la police tire à balles réelles : une femme tuée, 15 blessés sérieux.
Il faut croire que, malgré grèves et insécurité, les profits en valent la peine car, malgré ce sombre tableau, les exportations dans le secteur textile se sont accrues de 21 % en 2013sur 2012 et en novembre 2013, elles ont bondi de 29 %.
ETATS-UNIS
– *23/01/2014 – La Silicon Valley en Californie n’est plus un eldorado. Spéculation immobilière et dégradation des services publics à cause de la crise font que nombre d’habitants de San Francisco sont tributaires des transports publics déficients et qu’ils mettent les pieds dans le plat : sur le terrain, blocages routiers, vandalisations des bus. De plus, la crise dans les autres régions fait de la Silicon Valley une sorte de « miroir aux alouettes » qui attire des nouveaux migrants, ce qui aggrave les conditions de vie dans toute la région.
IMMIGRATION
ISRAËL
–* Le débat politique masque la situation économique réelle. Sur 8 millions d’habitants, 1,7 million sont sous le seuil de pauvreté (640 euros par personne, 1 000 euros pour un couple), 33 % sont des enfants ; le taux est passé de 20 % à 23 % en 2013. Un paradoxe : parmi ces pauvres, 200 000 survivants de la Shoah qui, dans les camps, rêvaient de la Terre promise.
Enorme disparité entre riches et pauvres : 20 familles dominent toute l’économie du pays et contrôlent avec la moitié du stock d’actions 25 % des grandes entreprises. Autre paradoxe, les Israéliens qui le peuvent émigrent aux USA et même en Allemagne. Mais l’économie tourne avec une sous-classe formée non seulement des immigrés mais aussi des juifs émigrés d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Ces derniers, les « mizrahim », sont payés 40 % de moins que les autres juifs, au même niveau que les immigrants légaux non juifs (sous statut précaire de trois mois renouvelables si bien dociles), Philippins dans la santé, Chinois dans le bâtiment…
Mais, encore plus inférieurs dans la hiérarchie économique, les immigrés clandestins originaires des pays chrétiens d’Afrique (Ethiopie, Sud-Soudan) qui, par dizaines de milliers, rançonnés par les tribus bédouines, ont traversé le désert du Sinaï pour s’entasser dans les taudis des faubourgs de Tel Aviv, victimes de fréquentes attaques racistes et exploités dans les conditions que l’on peut imaginer dans la restauration, les hôtels, le nettoyage et tous les autres services à la personne, et bien Israël voudrait se débarrasser d’eux.
Le gouvernement a édifié une barrière électronique de sécurité de 240 kilomètres qui interdit pratiquement tout passage. Parallèlement, le Parlement a voté le 10 décembre une loi autorisant la détention illimitée des immigrants sans visa. Ceux qui sont pris au piège — 60 000, certains depuis 2006 —, rejetés d’un droit d’asile hypothétique et considérés comme illégaux, sont pourchassés et internés dans des centres de rétention où ils risquent de rester longtemps car inexpulsables, faute d’accord avec leur pays d’origine.
Leur révolte a commencé, très limitée, pour devenir un puissant mouvement : 200 immigrés clandestins manifestent le 16 décembre, ils sont des milliers le 28 décembre et des dizaines de milliers le 5 janvier Le 6 janvier, ils sont devant les ambassades des pays européens et des USA. Le 8 janvier, ils sont 10 000 devant le Parlement à Jérusalem. Ils se mettent en grève illimitée, la suspende le 13 janvier mais sa reprise peut intervenir d’un moment à l’autre.
Réponse de Netanyahou : « Les protestations et la grève n’y changeront rien, ce ne sont pas des réfugiés mais des travailleurs immigrés illégaux qui seront traduits en justice. » Il ajoute que leur présence est une menace à l’identité juive. Des contre-manifestations et des agressions de la part d’Israéliens hostiles aux immigrés prennent un caractère nettement raciste.
NEPAL
– *15/12/2013 – 2,5 millions de Népalais travaillent dans les pays du Golfe et en Malaisie sous contrat temporaire. 400 000 partiraient ainsi chaque années se faire exploiter dans les pires conditions mais reviennent au bout de deux ou trois ans avec un pécule, sauf ceux qui ont laissé leur peau en cours de route : chaque jour, l’aéroport de Katmandou accueille deux cercueils de ceux que la famille peut « rapatrier », les pieds devant.
HONG-KONG
– *19/01/2014 – Ils sont 300 000 dont 15 000 Indonésiens à être exploités dans la domesticité. Une indonésienne de 23 ans malmenée et violée par ses patrons est « la goutte » qui fait déborder le vase : ils sont 5 000 de ces « domestiques » à manifester et promettent de recommencer aussitôt que possible.
PALESTINE
– Dans l’environnement d’Israël vivent 5 millions de Palestiniens expulsés de l’Etat d’Israël en 1948-49 (et leurs descendants), parqués depuis soixante ans dans des camps de Gaza, Cisjordanie, Jordanie, Syrie et Liban, sous perfusion de l’ONU, les services essentiels étant assurés par 4 500 employés de l’Unrwa (The United Nations Relief and Works Agency). Cet organisme, subventionné par l’ONU et des dons divers des Etats, à cause de la crise, a vu ses crédits de fonctionnement diminuer alors que le nombre des réfugiés et de leurs descendants augmentait. En Cisjordanie, où s’entassent dans 19 camps 740 000 Palestiniens, ces employés sont aussi des Palestiniens. Récemment, pour combler le déficit, 55 employés ont été licenciés. D’autres employés se sont mis en grève le 3 décembre, revendiquant une augmentation de 10 %, l’alignement de leurs conditions de travail sur les employés des camps de Gaza et la réintégration des 55 licenciés. Cette grève perturbe sérieusement la vie des camps car il n’y a plus les services essentiels, ceux procédant à la distribution de la nourriture et à l’approvisionnement en eaux, les écoles, les services hospitaliers, le ramassage des ordures, etc. Par exemple, dans un des principaux camps proches de Ramallah, Jalazoum, 15 000 « résidents », il n’y a plus d’école, de clinique, les ordures s’empilent dans les rues et une tempête de neige n’arrange rien. Une agitation sauvage monte dans les camps dont sortent les « résidents », jeunes pour la plupart, qui bloquent les routes proches.
La réponse des autorités de l’Unrwa est qu’il n’y a pas d’argent (le déficit de gestion est de 52 millions d’euros) et elles campent sur leur refus, espérant que le mouvement finira par pourrir. Au-delà de ce problème interne, il y a une pression des autorités palestiniennes qui pensent qu’une augmentation de salaire dans ce secteur peut faire exploser une demande de l’ensemble des salariés de Cisjordanie : déjà, les salaires de ces Palestiniens en grève sont supérieurs de 20 % aux salaires versés dans le reste du pays. Le 6 janvier, alors que la grève se prolonge, une rencontre entre les dirigeants de l’Unrwa, le syndicat et le gouvernement palestinien n’a rien donné. Un jour de grève de solidarité organisé à Gaza par les 13 000 salariés de l’Unrwa de ce territoire non plus. Mais un autre problème se pose, venant des « résidents » eux-mêmes : privés de tous les services publics essentiels, manquant de nourriture et d’eau, croulant sous les ordures, une autre révolte est née, venant essentiellement de la part des jeunes. Ceux-ci sont sortis des camps le 9 janvier pour bloquer les routes avoisinantes, se battant avec les flics palestiniens venus le 12 janvier les déloger : 40 flics blessés et seulement 10 du côté des résistants. C’est alors que l’armée israélienne est intervenue près du camp de Jalazoum, tirant à balles réelles et faisant 4 blessés (en décembre, un jeune avait été tué dans les voisinage du camp).
D’un autre côté, le désespoir conduit 23 des grévistes à mener une grève de la faim ; 3 d’entre eux ont dû être hospitalisés après six jours. Le 15 janvier, après quarante jours de grève, aucun signe de changement. Le gouvernement palestinien hésite entre une répression plus violente et le gouvernement israélien craint que la situation ne génère un nouvel intifada.
QUATAR
– *Novembre 2013 – Il a fallu le mondial de foot pour que les médias se penchent sur la situation des immigrés qui contribuent par leur surexploitation à la gloire du foot et des richesses publicitaires qui le nourrissent. Le 25 septembre, le quotidien anglais Guardian dénonçait la mort de 44 ouvriers sur le chantier d’un stade en construction entre juin et août. Le 10 novembre, un rapporteur de l’ONU surenchérit : « Certains immigrants ne reçoivent pas leur salaire ou sont payés moins que le salaire convenu. Je suis également préoccupé par le niveau des accidents et les conditions périlleuses menant à des accidents et à la mort. » Comme il n’y a pas de nationaux exploitables (300 000), les 1 700 000 immigrants qui forment le reste de la population devront être « complétés » par un million d’ouvriers supplémentaires. Le système est verrouillé pour garder les esclaves sous contrôle. Le « kafala » consiste à retirer le passeport aux immigrés pour les astreindre à des rapports de subordination inacceptables. En fin d’année 2013, le comité d’organisation du Mondial veut publier des « normes de protection des travailleurs ».
ETATS-UNIS
—août 2013—La mort dans le désert de l’Arizona ( pas seulement d’épuisement, de soif mais de morsures de serpents ou de scorpions) attend les migrants venus de toute l’Amérique Centrale à travers la frontière mexicaine. Alors que ces migrants sont pourchassés par des patrouilles policières des groupes de volontaires sous l’étiquette « no more deaths » patrouillent eux aussi pour leur offrir eau et nourriture habits et soins Les rapports avec les flics ne sont pas spécialement amènes. Récemment des poursuites judiciaires ont été engagées contre certains d’entre ces volontaires qui avaient déposé des jerricans d’eau sur un trajet supposé des migrants sous l’inculpation d’avoir souillé le désert.
EN MARGE DES LUTTES OUVRIERES
Dans le précédent bulletin, nous avions tenté une approche des mouvements, très confus dans différents pays, différenciés de la lutte de classe mais associant néanmoins travailleurs et précaires. Pour la France, le mouvement des Bonnets rouges vite éteint présentait ces mêmes caractères. L’Italie a connu un mouvement identique, celui des Forconi (les fourches). Fondé il y a deux ans en Sicile, regroupant les patrons de petites entreprises et les fermiers, revendiquant l’autonomie de la Sicile, il était un assemblage hétéroclite de travailleurs agricoles, de routiers, de chômeurs, de retraités, de précaires, d’étudiants, d’ouvriers, qui tous avaient de bonnes mais divergentes raisons de s’élever cotre le système. Poussé par la crise et par les mesures d’austérité, le mouvement a franchi de détroit de Messine pour essaimer dans toute la péninsule et engranger le même foullis de protestataires hétéroclites. Il a pu, le 9 décembre 2013, organiser un mouvement national de blocage des routes, des chemins de fer, occuper des mairies, les gares des principales villes d’Italie. Il s’est quelque peu alors affronté avec les flics. Le soutien de Beppe Grillo et de Berlusconi n’était pas spécialement un cadeau. Mais le succès de l’action du 9 décembre lui a donné des ailes pour tenter une grande manifestation à Rome le 18 décembre : il ne réussit qu’à rassembler 15 000 manifestants et ce fut son chant du cygne. Comme pour les Bonnets rouges en France, on ne parle plus des Forconi en Italie.
LES MUTATIONS DU CAPITALISME
SUD-EST ASIATIQUE
– L’augmentation des coûts de production en Chine, sous les coups de bélier de la lutte de classe, contraint les donneurs d’ordre à se tourner vers les pays du sud-est asiatique où l’important réservoir de main d’œuvre d’origine agricole et une pouvoir central autoritaire et aisément corrompu peuvent garantir, à la fois des conditions d’exploitation minimales, peu de réglementation sur le travail, aucune contrainte environnementale, et une paix sociale nécessaire au bon fonctionnement de l’exploitation (d’autres éléments peuvent aussi intervenir : un certain niveau d’instruction, des voies de communication faciles et sûres, etc.).
Les pays de destination de ces délocalisations ne manquent pas, aussi bien dans le sud-est asiatique que vers des continents plus lointains comme l’Inde et l’Afrique. Les investissements étant très faibles, ces transferts sont relativement aisés et souvent, même, les donneurs d’ordre peuvent trouver sur place des entreprises déjà établies qui ne demandent qu’à se développer. Bien sûr, lorsque l’on créée des prolétaires, on créée du même coup la lutte de classe. On parle ainsi de nombreuses batailles qui touchent d’abord les salaires, leur faible montant, et leur paiement plus que les conditions de travail (pourtant souvent dignes de celles du début du capitalisme). Où les choses se compliquent souvent, c’est que ces luttes peuvent servir de tremplin à des oppositions politiques tentant d’élargir leur influence. Nous verrons comment, par exemple au Bangladesh, ces conflits politiques peuvent se superposer aux conflits de classe. On pourrait même se demander si dans la concurrence entre pays de délocalisation, les conflits chez le voisin ne seraient pas manipulés pour faire fuir les investisseurs et les amener à s’installer chez soi.
MONDE
—décembre 2013—De l’utilisation de la « franchise » pour accroître les conditions d’exploitation. L’utilisation de ce mode de gestion est essentiellement concentré dans la restauration rapide qui a des marges de profit réduites. Mais pas seulement chez Burger King ou Macdo;Amazon, Wal’mart, Apple entre autres y sont aussi abonnés Le magasin sous franchise doit payer des royalties à la compagnie mère un pourcentage du chiffre d’affaires pas des profits, le coût du travail est la seule variable qui peut lui garantir un profit. C’est la raison pour laquelle on y trouve le plus grand nombre d’infractions avec la législation du travail à commencer par les salaires ( aux USA, les salaires des « franchisés » est 65% de celui des salariés des non franchisés du même secteur) et le temps de travail. Aux USA, contraints d’appliquer les minima de salaries les boîtes franchisées réduisent les effectifs ou les horaires( accroissant la charge de travail des restants)
CHINE
– 4/2/2014 Les entreprises chinoises se trouvent devant des problèmes que le capital a pu connaître dans les pays développés il y a lus d’un siècle: comment discipliner la force de travail pour qu’elle soit présente là où on l’attend.; Il est bien connu que pour le nouvel an chinois les migrants retournent dans leur village. C’est bien connu aussi que 30% d’entre eux ou ne retournent pas ou en profitent pour changer d’air.. Les dirigeants d’entreprise, pour garder leut exploités et d’assurer qu’ils ne partent pas avant et qu’ils retournent en temps utile, ont imaginé tout un système d’avantages pour s’assurer que les effectifs seront toujours au complet. ; Par exemple, leur payer le voyage, leur promettre une prime de retour, D’autres « avantages » sont aussi octroyés pour réduire le turnover.
LES CRIMES DU CAPITAL
CHINE
– *Janvier – L’exploitation du travail des enfants est répandue dans le monde entier. A Shenzhen, une firme de l’électronique exploite 70 mineurs âgés de 12 à 14 ans. Ceux-ci sont « recrutés » dans les zones frontalières du Sichuan parmi les minorités ethniques par des négriers qui continuent de percevoir des dîmes basées sur l’intensification de l’exploitation : plus de douze heures par jour.
*Dans le Zhejiang, une explosion dans une usine de chaussures tue 14 travailleurs.
* Le 31 décembre 2013, on a constaté que 3,33 millions d’hectares de terres arables sont trop pollués pour être cultivables, la superficie moyenne d’un département français.
* août 2013—Le communisme de marché n’a rien à envier au capitalisme de marché. La domination du capital par tous moyens génère ici comme ailleurs une vague de violence quotidienne . La Chine vit dans une période de transformation profonde où l’argent devient roi et où toutes sortes de conflits sociaux et de protestations surgissent. Parce que le port des armes est strictement interdit, la violence sociale individuelle d’individus totalement déboussolés par les exactions du système et leur déstabilisation sociale, ne s’exprime pas dans des attaques aux armes à feu individuelles et/ou collectives mais dans l’usage des armes blanches. En 2010, 4 attaques au couteau dans des écoles ont fait plus de 15 morts et 80 blessés. Récemment, après avoir acheté un couteau dans un supermarché, un homme attaque au hasard les clients; un autre poursuit une femme dans la rue avec une machette après avoir trucidé son mari, un troisième après une dispute avec une femme tue son bébé en le projetant sur le sol. Un homme dont on avait refusé d’enregistrer le 4ième enfant tue à l’arme blanche deux employés de l’état civil En juin un retraité mécontent du montant de sa pension incendie un bus brûlant 47 passagers dont lui-même. On pourrait dresser une longue liste de tels crimes commis pour les motifs les plus anodins et les plus divers qui ne dépassent pas souvent les limites des médias locaux. Mais leur nombre est si important que les autorités nationales ont décrété que pour acquérir un couteau dans un supermarché il faut faire enregistrer sa carte d’identité; mais cela, et pour cause, n’a eu aucun effet sur la fréquence de tous ces crimes. D’un autre côté, soi disant pour endiguer cette « extrême violence » , les patrouilles de flics ont été multipliées dans les lieux publics ( cafés, bars, hôtels,, massages, etc..) pour identifier les « suspects ». Il est bien évident que toute mesure ( qui relève plus d’ailleurs du contrôle politique) prise au nom du « respect de l’ordre » ne change rien à la pression sociale globale qui tient non seulement au régime politique mais aux conditions d’exploitation du travail et au fossé de plus en plus grand entre riches récemment enrichis et pauvres de plus en plus pauvres.
BANGLADESH
–1*7/01/2014 – Décompte macabre et fuite des responsabilités. Les victimes, familles des assassinés et blessés lors de l’effondrement de Rana Plaza où se trouvaient, chiffre officiel, 3 500 esclaves. Des décombres, on a extrait 1 133 corps dont seuls 833 ont été identifiés. Sur les 1 509 survivants, 611 ont subi de graves blessures. Jusqu’alors, 1,4 million d’euros ont été distribués à 700 familles (20 000 euros chacune). Un fonds d’indemnisation a fait l’objet en décembre 2013 d’un accord entre le syndicat patronal Bgmea et les syndicats, mais seules 4 firmes étrangères exploitant les travailleurs bangladais y ont contribué. Les 25 autres parmi les plus importants clients se défilent et refusent sous des prétextes divers d’alimenter le fonds d’indemnisation. L’administration locale a payé à chaque famille de victimes 200 euros pour les frais d’obsèques et une partie des salaires impayés lors de l’effondrement (32 euros par mois). Une bonne partie des exploités étaient de jeunes femmes dont les salaires alimentaient en partie la famille restée au village. Sur les 1 509 survivants, 63 % ont été blessés et 92 % n’ont pas retrouvé de travail. Une prétendue campagne de prévention destinée à déceler les risques d’incendie et d’effondrement n’a entraîné, en décembre 2013, l’inspection de seulement 150 usines sur les 5 000 du secteur de la confection.
SUD-SOUDAN
–* 20/01/2104 – Pétrole ensanglanté.
Les violences inter-ethniques recouvrent les luttes pour les puits de pétrole et leur pactole : plusieurs milliers de morts, 460 000 personnes déplacées, 86 000 réfugiées dans des camps.. Trois facteurs restent déterminants dans cette guerre civile:1) les compagnies pétrolière, pour contraindre les belligérants à s’entendre ont réduit leur production ce qui entraîne pour tous les belligérants des pertes importantes de ressources. 2) La Chine qui est le principal investisseur pétrolier peut faire une pression efficace pour contraindre à de pourparlers 3) les rivalités ethniques sont telles que toutes ces pressions pétrolières peuvent être inefficaces et le pays glisserait encore plus dans une guerre civile généralisée Les guerres autour du Soudat ont déjà fait plus de 2 milions de morts en quelques années.
TRINIDAD ET TOBAGO
– *7/01/2014 – « Trop riches pour être si pauvres » déclare un habitant de ces îles des Antilles où la richesse pétrolière côtoie une misère généralisée et une violence extrême. Le taux des crimes y est un des plus élevés du monde : 13 meurtres dans les sept premiers jours de janvier 2014.
ETATS-UNIS
– Malheureusement cela ne se passe pas qu’aux USA. Les restrictions de crédit des services publics ont réduit nationalement de 1950 à 2010, le nombre d’établissements psychiatriques de300 à 200 et le nombre de patients de 500 000 à 50 000. Tous ceux qui devraient normalement y être soignés se retrouvent en prison et leur nombre s’est accru avec la crise , de qui décuple les problèmes déjà inhérents à la privation de liberté dans des conditions d’autant plus contraignantes que là aussi les restrictions de crédit ont aggravé les conditions matérielles de détention et l’insécurité. En septembre dernier, selon les Etats des USA, le taux des prisonniers ayant des troubles mentaux évidents variait entre 10% et 51% du nombre des prisonniers.
LES VISAGES MULTIPLES DE LA REPRESSION
FRANCE
– *6/01/2014 – Caudebec-les-Elbeuf (Seine-Maritime, près de Rouen). Pour avoir participé à un feu de palettes à la porte de l’usine ADMN, un militant syndical est convoqué au commissariat sur plainte de la direction, en fait un montage bidon pour aboutir au licenciement de ce délégué. Manif devant le commissariat au cours de son « audition ».
SINGAPOUR
– *9/12/2013 – Dans le précédent bulletin, nous avons évoqué la brève révolte des Indiens immigrés lorsqu’un jour de repos et de libations, un bus blesse un jeune indien : la rue explose. Plus de 400 manifestants attaquent et incendient bus, ambulance, voitures de flics et autres véhicules, et tiennent plusieurs heures la rue face aux flics. 27 arrestations. Le lendemain, 4 000 travailleurs étrangers sont interrogés par les flics. En cas de poursuites pour « troubles à l’ordre public », la peine peut aller jusqu’à sept ans de prison, agrémentée d’une bastonnade.
ALLEMAGNE
– *20/12/2013 – Hambourg. D’imposantes manifestations contre une menace d’expulsion d’un squat, Rota Flora, et les maisons Esso : 2 000 flics déployés contre 10 000 manifestants, 120 arrestations, 500 blessés. Mais cela ne suffit pas car de multiples incidents et protestations concernent les immigrés, les squatters. Le samedi 4 janvier, la police de la ville déclare « zones interdites » les districts de St Pauli, d’Altona, Einsbuettel et Sternchauze. Dans ces zones, la police pourra interpeller, arrêter, fouiller et expulser hors district les « indésirables ». Le lendemain dimanche, 263 personnes sont ainsi ciblées et 62 expulsées du quartier.
Pour être complet, on doit ajouter que ces mêmes mesures comportant des interdictions de rassemblement, toute assemblée est immédiatement dispersée. Ces mesures seront maintenues jusqu’au printemps.
ESPAGNE
– *10//01/2014. La crise bat son plein : taux de chômage de 26 % globalement et 58 % pour les 16-24 ans (en décembre dernier, 47 % des nouveaux contrats de travail signés étaient d’une durée de moins d’un mois et la moitié de ceux-ci n’étaient que de sept jours).
Il est envisagé de réduire le montant des indemnités de licenciements. Entre 2011 et 2013, le coût unitaire de la main d’œuvre a diminué de 3,2% et 60 % des travailleurs sous-emploi gagnent moins de 1 000 euros mensuels. La tension sociale explose un peu partout et le gouvernement entend renforcer la répression pour faire rentrer travailleurs et chômeurs sous les fourches caudines de l’austérité.
A Melilla, la distribution annuelle par la mairie de CDD de 6 mois à 1 000 euros mensuels par la municipalité déclenche une émeute où, outre les barricades de pneus et les affrontements classiques, on sort les fusils de chasse… Cela se répète à Burgos où des milliers d’opposants politiques (chômage d’un côté et corruption de l’autre) à une décision de la municipalité de lancer un projet pharaonique de travaux dans la ville se battent avec les flics : 40 arrestations.
Ces répétitions autorisent le gouvernement à parler de « spirale de la violence », de « collectifs anti-système », de techniques de « guérilla urbaine ». Il projette une loi réprimant d’amendes de 3 000 euros à 600 000 euros et de peines de prison : le délit de blocage routier est étendu à la notion de blocage des transports (deux ans de prison), celui d’insulte au flic est étendu à la résistance à l’autorité (quatre ans de taule), organiser une manif sans autorisation revient à appeler à manifester sur les réseaux sociaux (un an de cabane). Et, cerise sur le gâteau, un nouveau délit de « résistance active ou passive à grande échelle » est considéré comme une « atteinte à l’autorité ».
BRESIL
– *3/01/2014 – Pour « sécuriser » la coupe du monde de foot, une force spéciale de police a été créée : 10 000 « flics des émeutes » seront déployés dans les 12 villes où se dérouleront les matchs en juillet prochain.
AFRIQUE DU SUD
– *Janvier 2014 – Une loi vient de déclarer illégal le fait d’aller manifester avec des battes de baseball, des lances et des machettes. Ouf !
ACTIVITES SYNDICALES
ITALIE-USA
– *4/01/2014 Les arrières-plans d’un accord parfait Fiat-Chrysler : le syndicat UAW au centre d’une opération financière.
Dans les années 2009, la dérive des trois grands de l’automobile, GM, Ford et Chrysler, avait nécessité l’intervention d’Obama qui imposa alors une restructuration drastique, visant notamment l’abandon par le syndicat UAW de l’ensemble des garanties des contrats d’entreprise. Auparavant, en 2007, pour soulager leur finance, ces firmes avaient abandonné le paiement direct des retraites et des garanties maladie pour en confier financement et paiement à un fonds de pension, Veba . Chrysler, entièrement géré par l’UAW. Même si le fonds était alimenté par les contributions régulières des salariés en exercice, il fallait assurer les réserves pour les prestations maladie et retraite des 117 000 retraités de Chrysler et de leur famille. Ce qui fut fait lors de la restructuration Obama de l’automobile en confiant à VEB 41,46 % des actions Chrysler. Mais contributions et revenus des actions n’étaient pas suffisants pour établir l’équilibre du fonds Chrysler même en réduisant les prestations, ce qui fut fait. En 2013, la partie santé du fonds était déficitaire de 4,35 milliards de dollars. Ce qui permit à Fiat, qui voulait manger Chrysler, de mettre le couteau sur la gorge de VEB Chrysler. Après d’âpres discussions de marchands de tapis, Fiat put acquérir 41,46 % des actions Chrysler détenues par VEB Chrysler et devenir propriétaire de Chrysler. Finalement, on peut considérer que l’enrichissement de Fiat et le renflouement de VEB Chrysler se sont faits sur le dos des travailleurs de Chrysler qui ont dû accepter au cours des années écoulées la dégradation des conditions de travail et les licenciements concoctés par l’UAW et le patronat. Reste à savoir comment le fonds VEB Chrysler, ainsi privé de la garantie que représentait la détention d’une part importante de Chrysler, pourra assurer le paiement de l’ensemble des prestations aux retraités et à leur famille.
ETATS-UNIS
– *8/01/2014 – Pour soutenir la compétitivité dans le match mondial Boeing-Airbus, Boeing a obtenu du syndicat des machinistes et sous menace de transfert et délocalisation des usines de la région de Seattle (80 000 travailleurs) des concessions « acceptées » au finish par 51 % des 24 999 machinistes concernés, propositions qui antérieurement avaient été rejetées par 67 % des travailleurs. Le conflit traçait une ligne de partage entre les travailleurs et les responsables syndicaux locaux de base d’un côté, et la direction nationale du syndicat. Il faut dire que si ce transfert vers des usines non syndiquées avait été effectué, la bureaucratie syndicale aurait perdu 3 millions d’euros de cotisations. L’accord imposé dans ces conditions prévoit, en contrepartie de l’abandon de projets de délocalisation, l’abandon du système actuel de retraite et d’assurance santé pour un système beaucoup moins favorable aux travailleurs. Une prime de « reprise » de 8 000 euros n’a pas calmé le mécontentement des travailleurs concernés (le salaire d’un ouvrier de Boeing est en moyenne de 26 000 euros par an, certains gagnent jusqu’à 80 000 euros avec des heures sup.).
AFRIQUE DU SUD
– De plus en plus, la coalition gouvernementale (ANC, Cosatu et SACP) perd toute crédibilité, notamment après les grèves de l’an passé et le massacre de Marikana (voir précédents bulletins). Surfant sur la montée des grèves et de la contestation sociale dans les townships, des forces politiques de remplacement se précisent. Le syndicat de la métallurgie Numsa, pourtant affilié à la confédération Cosatu, tente de former une troisième force politique en vue des élections du printemps prochain. Sur le plan syndical, les grèves dans les mines de platine ont vu la montée d’un syndicat rival du NUM, la confédération Amcu, qui vient de déclencher une nouvelle grève illimitée dans les mines de platine avec la revendication du doublement des salaires( l’inflation est—officiellement– de 5,3%) La grève est effective (70 000 mineurs en grève) et bloque toute production. Mais la tentative de l’étendre aux mine d’or a été stoppée par une décision de justice, l’Amcu étant liée par un contrat collectif signé l’été dernier par le NUM qui rend toute grève illégale.
Le président de l’AMCU bien que dénonçant la collaboration de classe et à la corruption des dirigeants de l’ANC , de la fédération syndicale COSATU et du syndicat des mineurs NUM harangue les grévistes en ces termes: « C’est une révolution de l’économie de l’Afrique du sud et nous allons la vivre » tout en ajoutant » Personne ne va être tué. Nous devons être disciplinés » Dans une autre mine de platine de plus petite dimension, après une grève de 75 jours, les mineurs ont obtenu une augmentation de 9,50 %. Ce qui complique la situation dans les relations de travail c’est qu’il y a toujours latente la menace de grèves sauvages. Beaucoup font référence à l’année 2012 au cours de laquelle les travailleurs écœurés par les syndicats avaient formé des comités autonomes et organisé des grèves sauvages. Le syndicat AMCU avait d’une certaine façon regroupé ces comités mais en même temps avaient empêché que cette autonomie se développe.
FRANCE
– *20/12/2013 – Méandres syndicaux chez Renault.
L’accord de compétitivité signé le 13 mars 2013 par la CFDT, CFE-CGC et FO permet 8 260 suppressions d’emplois ou/et le gel des salaires. Cet accord est contesté par la CGT qui obtient un jugement de la cour d’appel déclarant que cet accord ne peut remplacer « de plein droit » ceux existant antérieurement. On tombe ici dans un maquis juridique et des rivalités syndicales dont les travailleurs de Renault risquent de faire les frais.
*Janvier 2014 – Fin de la saga de Goodyear ou comment les travailleurs font les frais de la politique de la direction de la centrale CGT.
Goodyear est une multinationale américaine, un conglomérat dont seulement une partie est consacrée à la production de pneumatiques ; elle possède de nombreuses filiales de par le monde, indépendamment de ses usines propres. Deux de ces usines en France sont à Amiens, baptisées Amiens Nord et Amiens Sud bien que situées dans un même zone industrielle et seulement séparées pas une route. En 2008, un projet de fusion des 2 usines échoue devant le veto de la CGT.
En 2009, la CGT est majoritaire dans les 2 usines mais avec 2 sections syndicales distinctes. La direction propose alors un plan de restructuration des 2 usines avec à la clé un chantage à la fermeture totale (900 postes pour le sud, 1170 pour le nord). Ce plan implique le passage aux 4 x 8 (2 matins, 2 après-midi, 2 nuits, 2 repos, 30 weekends travaillés). La section d’Amiens Sud, suivie par les travailleurs, accepte de discuter le plan. La sanction tombe de la direction fédérale CGT de Paris : dissolution de la section et exclusion de l’ensemble des délégués. Tous les adhérents de cette section majoritaire passent à l’Unsa qui, avec FO et FTC, signe le plan de restructuration : l’usine et les emplois sont « sauvés » et aujourd’hui, l’usine Sud tourne à plein rendement, à peine touchée par la crise.
Amiens Nord refuse l’application du plan et entame une longue lutte pour tenter d’empêcher la liquidation de l’usine et, semble-t-il, démontrer à ceux de l’usine Sud que lutter ne peut qu’être profitable, même dans les circonstances présentes. La lutte devient même exemplaire sur le plan national. On va voir des tentatives de toutes sortes — depuis des reprises assorties de plans sociaux jusqu’à la constitution d’une coopérative ouvrière (Scop) qui reprendrait la fabrication des pneus agricoles, une des spécialités de l’usine.
Toutes ces tentatives échouent devant l’intransigeance soit de Goodyear, soit de la CGT. Plusieurs plans de départs volontaires avec reprise par l’américain Titan en 2011, en septembre 2012, puis en juin 2013, échouent, sans que l’on sache exactement sur quoi cela achoppe car chacune des parties se renvoie la balle. Ce qui semble certain c’est qu’après ces années de lutte sans résultat, la position intransigeante de la CGT commence à faiblir et que celle-ci, tentant le tout pour le tout, tente d’adopter une position plus radicale (sans que l’on sache si c’est la réponse à une pression de la base). Toujours est-il que, sur consignes syndicales CGT, 2 dirigeants de l’usine sont séquestrés ; leur libération deux jours plus tard s’accompagne d’une occupation de l’usine. Il est difficile de dire s’il s’agit d’un baroud d’honneur car le 22 janvier, un accord de fin de conflit est signé par l’ensemble des syndicats, y compris la CGT. L’ensemble des 1 173 travailleurs sont licenciés, l’usine sera reprise par Titan avec au départ zéro effectif, et la perspective de 333 embauches. L’accord prévoit pour les licenciés des indemnités conséquentes, une période de reclassement indemnisée de quinze mois et le paiement d’une mutuelle pendant vingt mois. L’accord est présenté par la CGT comme une victoire apportant le triplement des indemnités promises dans l’accord avorté de 2012. Ce qui est immédiatement contesté dans les médias qui donnent même des exemples de diminution de l’indemnisation pour certains des licenciés. La CGT ne conteste pas ces chiffres mais précise que « l’accord prévoit un triplement de l’enveloppe prévue pour les départs volontaires et non le triplement des indemnités de chaque salarié ».
La conclusion de cette lutte de sept années et des divisions syndicales, y compris dans la CGT, c’est que dans une période de crise comme celle que nous connaissons présentement, il s’agit soit de travailler aux conditions imposées par le patronat, soit d’accepter la fermeture de la boîte (en se battant pour obtenir plus d’indemnités) et l’incertitude du chômage.
Dans un cas comme dans l’autre, les travailleurs restent soumis aux positions et manipulations des centrales syndicales, sauf s’ils prennent leurs affaires en mains, temporairement car, tôt ou tard, si leur combat reste limité, leur lutte sous la coupe des intermédiaires dans la gestion de la force de travail
* janvier 2014—Que signifie la représentativité syndicale? En mai dernier cinq syndicats ont gagné la loterie pour ètre « représentatifs » sur le plan national et c’est encore plus compliqué pour la représentation de branche ( 470 arrêtés pour la fixer) et encore plus pour celle de l’entreprise. A ce niveau de l’entreprise, un accord d’entreprise ne peut être signé que par les syndicats ayant recueilli 30% des votants, de légères variations autour de ce chiffre peuvent contraindre à des combinaisons. Celles6ci peuvent s’ajouter à des marchandage entre syndicats sur le plan de l’entreprise pour garder la représentativité, contraignant à des alliances contre nature et pas forcément acceptées par les adhérents. Tout cela doit aussi être relacé dans la faible adhésion syndicale ( moins de 10% nationalement pour l’ensemble des syndicats et des travailleurs) et la faible participation aux élections d’entreprise ( en général plus de 30% d’abstentions). Cette participation aux élections prud’homales est si faible ( 75% en 2008) qu’un projet de loi prévoit leur suppression pure et simple et la désignation des conseillers au prorata de la représentativité nationale des syndicats.
http://spartacus1918.canalblog.com/archives/2014/02/12/29195122.html
France. L’autogestion à la rescousse dans la crise du capital (Fralib, Seafrance, Goodyear)
Article est paru dans Echanges n° 145 (automne 2013).
Le 24 juillet, le conseil des ministres a discuté et finalisé un projet de loi « Economie sociale et solidaire (ESS) » modifiant le statut des scop (sociétés coopératives ouvrières de production) qui, en France définit le cadre juridique des coopératives, autrement dit la manière dont l’autogestion doit fonctionner sous le capital. Ce projet qui devait venir en novembre devant le Parlement prévoit notamment les modalités selon lesquelles les salariés d’une entreprise pourront la reprendre lors du décès du propriétaire. Il n’est ni utile, ni nécessaire d’entrer dans les détails de ce projet qui ne fait que compléter la législation déjà existante sur les coopératives et favoriser la création d’une scop dans ces circonstances précises, d’autant plus qu’il peut être modifié lors de son vote.
Les coopératives de production ou de consommation, agricoles ou industrielles, sont parfaitement intégrées dans ce monde. Elles ne sont souvent qu’un cadre pratique pour couvrir une situation proche de celle de n’importe quelle entreprise capitaliste et de plus leur importance relative face à la puissance des multinationales les relègue au rang de marginalités économiques.
Il ne s’agit même plus de critique théorique de l’autogestion mais seulement de considérer ce qu’elles sont réellement dans le système capitaliste et le rôle que leur présence peut jouer eu égard à l’ensemble du système productif mondial. Deux exemples extrêmes permettent de situer dans quel sens toute coopérative peut évoluer.
Des grèves récentes en Italie ont révélé que tout le secteur logistique est sous forme de coopératives, ce qui permet – un paradoxe quant au principe même de l’autogestion – de tourner totalement les lois sur le travail et de garantir une exploitation maximum de la force de travail. C’est tout simple, les quelques dirigeants majoritairement propriétaires de la coopérative, contraignaient les postulants salariés à être coopérateurs, ce qui les excluait de la condition de salarié et des garanties et avantages sociaux réservées aux salariés. Ceci permet une exploitation sans limites légales, puisqu’ils s’auto-exploitent comme tout « indépendant ».
Un autre exemple est donné par cette coopérative que les milieux de l’autogestion citent souvent, l’espagnole Mondragon. C’est en fait un conglomérat de sous-traitants dispersé dans le monde, qui n’a rien d’une coopérative ; grâce à cette internationalisation, son chiffre d’affaires atteint environ le montant du seul budget de publicité d’un autre conglomérat international, le chaebol coréen Samsung. La faillite récente de Fagor Electrodometicos, filiale de Mondragon, illustre la domination capitaliste sur les activités des coopératives.
On pourrait multiplier à l’infini toutes les variations capitalistes des coopératives de par le monde, la pureté autogestionnaire étant peut-être seulement réservée à de très petites scops, et encore dans certains secteurs économiques spécifiques, celles qui servent de support à l’idéologie autogestionnaire. Cette idéologie ignore le fait simple que toute activité économique dans un monde capitaliste est contrainte peu ou prou de se plier aux règles de fonctionnement de ce système. Bien que l’on dise que les coopératives de toutes sortes regrouperaient près de 10 % de l’activité économique en France et 2,4 millions de travailleurs, on ne dit jamais ce qui se cache derrière ces chiffres : beaucoup d’entreprises privées qui n’ont rien ou presque rien à voir avec les principes avancés de l’autogestion ouvrière. On remet au goût du jour la coopérative comme solution de survie d’un système qui n’arrive à résoudre ses contradictions que pour tomber dans d’autres contradictions ; elle ne devrait pourtant pas apparaître comme la panacée à la lumière des récentes tentatives de la promouvoir sous le slogan de « reprise de l’entreprise capitaliste par ses travailleurs ».
Trois exemples récents permettent de se faire une idée des difficultés que rencontre l’engagement dans cette voie de sauvetage d’une entreprise en difficulté ou d’une unité fermée pour cause de stratégie économique d’une multinationale.
Fralib à Gemenos près de Marseille. Seule une partie des salariés (77) occupent l’usine de conditionnement de thé et tisanes fermée depuis deux ans par le trust Unilever. Le projet de scop qu’ils voudraient bien créer suppose la reprise d’une marque déposée par Unilever, mais la multinationale refuse absolument d’accéder à cette requête, même en sous-traitance.
Un des points particuliers de ce projet a été le rachat du terrain et des bâtiments de l’usine par la Communauté urbaine qui les mettrait à disposition de la future scop. Cette dissociation du capital fixe et du capital variable va se retrouver dans la scop constituée suite à la mise en faillite de Seafrance (1).
Seafrance à Calais. Lors de la liquidation de Seafrance, entreprise qui exploitait la liaison Calais-Douvress, ses trois ferries ont été rachetés par Eurotunnel, un groupe qui exploite le tunnel sous la Manche, une filiale de fret, Europorte, et, suite à ce rachat, une branche de trafic maritime. Mais cette activité d’armateur a pris un caractère très spécifique : l’exploitation desdits navires pour le trafic transmanche a été confiée à une scop constituée par les anciens salariés de Seafrance sous le nom de MyFerryLink.
Cette scop a prospéré au point qu’en août 2013 elle prenait 11 % du trafic transmanche et le groupe Eurotunnel prenait alors plus de la moitié de ce trafic. C’est là que les choses se sont gâtées pour la scop. La Grande-Bretagne, pays de la libre concurrence, met en fait des barrières à cette concurrence pour la protection des intérêts du capital britannique. Une des compagnies de ferries, la plus concernée par cette concurrence, P & O, et une autre danoise, DFDS Seaways (associée à l’armateur français Louis Dreyfus), ont intenté un procès à Eurotunnel devant la « Competition Commission » britannique prétendant que le rachat et l’exploitation des navires de Seafrance mettrait Eurotunnel en position de quasi-monopole et pourrait alors imposer des prix préjudiciables aux utilisateurs. Un premier jugement leur a donné raison en ordonnant à Eurotunnel de vendre deux navires sur trois sous peine de se voir fermer l’entrée du port de Douvres. C’est une situation cornélienne car le jugement du tribunal de commerce de Paris attribuant les trois navires à Eurotunnel comportait une clause lui interdisant la vente des ferries.
Le 4 décembre, cependant, la cour d’appel britannique a autorisé les ferries de la scop MyFerryLink à continuer de relier Calais à Douvres. Mais toute l’affaire montre les limites de l’utilisation de la forme coopérative qui, dans ce cas, n’est finalement qu’un organisme de gestion (d’autogestion bien particulière) de la force de travail pour le compte d’un capitaliste.
Goodyear à Amiens. Une opération du même genre est tentée pour l’usine de pneumatiques Goodyear d’Amiens. Là aussi, une scop reprendrait la fabrication des pneus agricoles, à condition que Goodyear lui cède ou la marque ou la sous-traitance. Bien sûr, comme dans le cas de Fralib, le trust s’y oppose et les choses tournent autour de batailles juridiques comme dans le cas antérieur de l’usine Continental près de Compiègne. De toute manière, si cette solution pouvait se mettre en place, la scop ne serait qu’un maillon dans le giron d’un groupe capitaliste puissant qui imposerait l’ensemble des facteurs économiques déterminant, au final, les conditions de gestion de la force de travail. Les décisions des « coopérateurs » seraient entièrement déterminées par des facteurs extérieurs aux mains du capital, à l’exception de quelques modalités sans influence réelle sur les conditions d’exploitation. Ces exemples montrent que le sort d’une coopérative reprenant une activité quelconque et que la réalité quelque peu fallacieuse d’une telle voie, préconisée très timidement par le projet de loi « Economie sociale et solidaire », ne sont qu’un replâtrage politique face à l’énormité de la crise du capital.
H. S.
NOTE
(1) Cette dissociation n’est pas rare dans le capitalisme d’aujourd’hui : par exemple pour les chemins de fer en France, la SNCF a été divisée entre propriété et entretien des voies au Réseau Ferré de France (RFF) et la nouvelle SNCF, propriétaire des trains et gestionnaire du trafic (comme antérieurement en Grande-Bretagne). Et ce n’est pas un cas isolé.