Un collectif d’allocataires en colère a investi le toit du siège de la Caf 13

« Les courriers en retard ? C’est pire que dans le bureau de Gaston Lagaffe ! » s’écrie un manifestant qui a gardé le sens de l’humour, tout assurant « sauf qu’ici, ça fait pas rire. C’est même grave. Ceux qui en ont besoin sont pauvres et se retrouvent vite sur la paille avec un dossier qui bloque ». Si la direction de la Caf 13 se félicitait encore mercredi dernier du traitement de « plus de 42% des dossiers en attente », les allocataires ont beaucoup à perdre dans cette réorganisation des services et ils le disent haut et fort…depuis le toit du siège de l’administration.

Des marins-pompiers, des voitures de police… pas de casse au chemin de Gibbes hier matin au siège de la Caf 13, mais un « envahissement » des locaux par un collectif d’usagers en colère. Tout relatif, d’un dizaine d’individus. Les autres sont restés devant les grilles fermées. C’est que les allocataires n’en peuvent plus des couacs administratifs dont ils subissent les conséquences très rapidement. « Dossier bloqué, Caf occupée » titre leur banderole.

Il y a ce problème récurrent, structurel, des dossiers en retard. Difficile à résorber puisque même en fermant les centres, les nouvelles demandes s’accumulent. Et il y a, en prime, le parti pris de la direction de réorganiser ses services en usant des guichetiers pour traiter les dossiers, remplaçant ces derniers par des bornes, des rendez-vous téléphoniques ou un site Internet, qui ne soulagent guère les attentes. Bien au contraire, les allocataires, privés d’accès à leurs droits, demandent l’embauche de personnels.

Comment on fait?

Rien de drôle en effet hier matin devant les grilles closes. Désespérée, une dame s’adresse au vigile « Mais je fais quoi moi ? Mon mari en à l’hôpital et j’ai besoin d’un papier pour la CMU ». Devant ses larmes, l’homme cède le passage. Une autre usagère confie à un monsieur accroché aux barreaux « si on est gentil, ils nous laissent entrer…mais dedans y’a personne. Même le téléphone est cassé ».

Assiata est venue de Saint Barthélémy pour un acte de naissance qu’elle a déjà envoyé trois fois depuis le 7 avril mais qui n’a pas été pris en compte. « J’ai tenté Internet, mais ça bloque, il y a un truc que je ne comprends pas. Alors j’ai téléphoné, mais je n’ai que le disque ». Sabia, du Panier, n’est pas mieux lotie: « le téléphone ne répond pas, Internet ne marche pas. En attendant depuis mars que je n’ai pas touché le RSA mon frigo est vide, j’emprunte, je m’endette…Comment on fait? »

Houria savait qu’on recevait sur rendez-vous maintenant, mais « j’ai téléphoné et j’ai eu la musique. Je paye la communication…mais je n’ai toujours pas de rendez-vous ». Gilles a fini par avoir un conseiller au bout du fil, il y a un mois. Il attend encore que le technicien le rappelle… « car le loyer tombe, lui ».

 

source : la Marseillaise

Énième procès de la pénitentiaire contre des taulardes de Réau

Mercredi 14 mai comparaissait la détenue Nassira M. pour des faits survenus à la prison de Réau le 13 février 2014: violence sur personne dépositaire de l’autorité publique suivie d’ITT en récidive, et violence sur personne dépositaire de l’autorité publique non suivie d’ITT en récidive.
Jugée coupable Nassira est condamnée à 2 mois fermes et 300 euros d’amendes à l’une des parties civiles et 150 euros à l’autre, un certain Hawokie, déjà apparu sur des procès similaires…
A ce sujet, (re)voir notamment: http://lenvolee.net/apres-une-lettre-collective-pour-la-re-ouverture-de-la-salle-convivialite-au-centre-de-detention-pour-femmes-de-reau/ 

Les prisons grecques en ébullition

Le 26 mai 2014

Quand un prisonnier grec, appartenant au groupe armé 17 Novembre et prisonnier de longue date, décide en décembre 2013 de ne pas retourner après un congé pénitentiaire, l’Etat grec a ouvert le feu répressif. Des perquisitions dans des dizaines et des dizaines de maisons d’anarchistes, des barrages policiers partout dans le pays, une collaboration historique entre l’armée et la police et le lancement d’une proposition de loi concernant les « détenus dangereux ». Cette proposition vise à diviser la population carcérale en trois catégories (A,B et C). Pour la catégorie C, des modules d’isolement seraient construits et les prisonniers de cette catégorie ne pourront pas bénéficier de congés pénitentiaires, leurs visites et communications téléphoniques seraient limitées, la surveillance policière (armée) dans les modules serait permise, leurs libérations conditionnelles seraient plus strictes, la délation serait encouragée,… L’Etat a ouvert tous les registres afin de pousser l’isolement prisonniers type C (anarchistes et communistes, les condamnés pour grand banditisme et les prisonniers rebelles) à l’extrême.

L’Etat est toujours à la recherche d’excuses pour charger son arme répressive, et dans ce cas, il l’a trouvé dans l’évasion d’un prisonnier. L’Etat se tient toujours prêt pour s’en prendre à toute personne qui n’obéit pas, mais en Grèce, cette proposition de loi s’est heurtée à un mouvement solidaire et univoque dans toutes les prisons du pays, et à une solidarité à l’extérieur des murs. Cela a obligé l’Etat à se retirer (aussi avec les prochaines élections en tête) par crainte que la situation déborde. La proposition a donc été gelée (en tout cas, provisoirement).

Qu’est-ce qu’il s’est passé lors de ce mouvement ? Fin mars, des prisonniers ont annoncé une mobilisation contre cette proposition de loi. Peu après, le prisonnier Ilia Kareli (déjà 16 années derrière les barreaux) tue un gardien connu comme bourreau (il torturait des détenus notamment avec des câbles électriques). Ensuite, Ilia est torturé par des gardiens jusqu’à la mort. Ces éléments (la proposition de loi et l’assassinat d’Ilia), tout comme la rébellion déjà présente contre les conditions dans les prisons, ont déchainé un mouvement massif des prisonniers. A plusieurs reprises et dans toutes les prisons grecques, les détenus ont refusé la nourriture de la prison et ont refusé de remonter du préau. A Korydallos, lors du préau, des prisonniers peignent des slogans sur les murs, scandent des slogans,…

A l’extérieur, des rassemblements de solidarité ont eu lieu devant les taules. Lors d’un rassemblement devant la prison où les gardiens ont assassiné Ilia, des détenus détruisent des caméras de surveillance et des vitres. Dans plusieurs villes, des manifestations ont eu lieu et partout des affiches de solidarité apparaissaient sur les murs. Il y a eu aussi des actions nocturnes comme le sabotage de distributeurs de billets, l’incendie d’un véhicule appartenant à l’entreprise de sécurité G4S, le jet d’une grenade contre la voiture d’un maton tortionnaire,… qui font que le mouvement ne reste pas isolé et saute les murs de la prison.

Nous passons ces informations parce que nous sommes solidaires et voulons répandre la voix de la révolte. Mais aussi parce qu’ici en Belgique, on doit faire face à des mesures répressives similaires et qu’on veut encourager la révolte contre ces mesures. Nous parlons des modules d’isolement et des régimes individuels imposés aux détenus réfractaires, de l’annonce du plan de construire une prison de haute sécurité à Achêne, du durcissement des conditions pour bénéficier d’une libération conditionnelle et de congés pénitentiaires, de l’encouragement de la délation en échange de quelques privilèges,…
Et n’oublions pas non plus qu’un module d’isolement a récemment été ouvert dans le camp de déportation pour sans-papiers à Vottem ; les détenus n’y peuvent même pas quitter leur cellule pour manger !
L’ombre de toute cette répression tombe aussi sur tout le monde à l’extérieur des murs : la chasse aux chômeurs, l’installation de centaines de caméras de police, les amendes administratives, toujours plus d’uniformes dans la rue,…

Il y a bien suffisamment de raisons pour se battre, alors, battons-nous !

Feu à toutes les prisons ; mort à l’Etat !

[Article paru sur La Cavale, mai 2014]

Rassemblement en soutien à Dorsaf et Walid

lundi 2 juin à 14h Cour d’Appel Aix-en-Provence 

En juin 2013, Dorsaf et Walid, membres du comité Vérité et Justice pour Abdelhakim
Ajimi ont été condamnéEs à 4 mois de prison avec sursis et 300 euros chacunE de
dommages et intérêts, pour « outrage à une personne dépositaire de l’autorité
publique ». Cette accusation vient de deux policiers qui « assuraient la sécurité »
lors du procès des policiers coupables de la mort de Abdelhakim Ajimi qui s’est
tenu à Grasse en janvier 2012… Dorsaf et Walid ont reçu des peines presque
maximales et comparables à celles des policiers condamnés pour la mort de Abdelhakim Ajimi !

Dorsaf et Walid ont fait appel de cette condamnation et le procès aura lieu *lundi 2
juin 2014**à 14h* à la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence. Le comité Vérité et Justice
pour Abdelhakim Ajimi appelle à un rassemblement devant la Cour d’Appel
d’Aix-en-Provence pour les soutenir lors du procès. Le comité lance également un
appel à soutien financier pour les aider à payer les frais d’avocat. Merci
d’adresser les chèques à l’ordre de l’UL CGT Grasse, en remplissant le bon
ci-dessous pour spécifier que c’est en soutien à Dorsaf et Walid.

En criminalisant des militantEs parmi nous, ils croient qu’ils vont nous faire
taire, mais c’est bien le contraire qui s’en suit : la lutte continue !

Le comité Vérité et Justice pour Abdelhakim Ajimi

Tout le monde à Calais le 27 ou dès le 26 dans la nuit !!!!

Les autorités ont décidé de détruire les trois camps majeurs des migrants
de Calais qui abritent environ 700 personnes, avec pour seule perspective
pour ses habitants : une pilule contre la gale et la rue ! Hors de
question de revivre les évènements de 2009 avec la destruction de la
jungle afghane qui s’est soldée par l’arrestation de centaines de
migrants, leur placement en rétention dans toute la France et des
tentatives d?expulsions vers l?Afghanistan. Hors de question que les 5
années de chasse à l’Homme qui se sont passées depuis repartent à zéro et
que la machine répressive se remette en marche de plus belle ! Plus jamais ça !

En septembre dernier, période annuelle de grand nettoyage matérialisée par
des rafles et des expulsions intensives, les autorités se sont heurtées au
courage et à la détermination de la communauté syrienne de Calais qui,
pour s’opposer à cette répression et à l’entrave de leur liberté, a
organisé la lutte en occupant le port transmanche. Certain-e-s d’entre
nous se rappelleront de ces images où l’on voit deux d’entre eux, sur le
toit, menaçant de se jeter dans le vide pour contrer la cavalcade de CRS
déterminés à les expulser. Et les CRS de s’arrêter, les bras ballants,
impuissants, spectateurs d’un courage et d’une détermination contre
lesquels ils ne pouvaient rien…

Ces réfugiés syriens revendiquaient le droit d’aller et venir librement
dans ce monde, d’être traités comme des êtres humains, et, s’ils n’ont pas
eu la possibilité de passer en Angleterre, leur lutte a malgré tout porté
ses fruits, et a abouti dans le visage des multiples tentes du « syrian
camp ». Baptisé ainsi en référence à cet épisode, il a pu tenir jusqu’à
présent avec une pression policière plus discrète conditionnée par la peur
d’une nouvelle vague de contestation radicale. C’est ce « syrian camp » et
ses émules qui sont aujourd’hui menacés, mais aussi le campement sous le
pont. Les érythréens, expulsés mi-octobre de leur maison, ont décidé de
créer un camp dans le contrebas du beffroi de l?hôtel de ville. Quel culot
de venir se poser aux pieds de Bouchart, qui n?avait d?autre choix que de
voir les conséquences inhumaines de sa politique raciste.

Laisser ces camps être détruits en toute impunité serait une insulte à la
mémoire de cette lutte exemplaire pour laquelle des personnes étaient
prêtes à mourir. Laisser une vague de CRS piétiner en silence ces espaces
de vie, de résistance, de solidarité, c’est oublier ce pourquoi ces
syriens qui, pour beaucoup d’entre nous ont des visages et des noms qui
nous sont familiers, ont résisté, sont parvenus à enrayer les mécanismes
de destruction et de déshumanisation qu’ils subissaient.

Nous devons rendre hommage à leur courage et à leur détermination ! Les
syriens nous ont montré la voie, nous ont donné un aperçu très clair de la
puissance du combat et de la peur que nous sommes tous et toutes capables
d’instiller chez nos oppresseurs pour, pas à pas, grignoter du terrain.
Ils ont pris tous les risques et jusqu’au bout, ont montré qu’ils étaient
prêts à payer le prix que le respect de leur dignité coûterait.

Aujourd?hui dans ces camps ce sont des migrants de toutes nationalités qui
font vivre ces lieux de résistance au quotidien. Et nous devons nous
battre pour préserver ces espaces de luttes quand les autorités n?ont pour
seule obsession que de rendre invisible, détruire, harceler pour que les
exilés demandent gentiment à rentrer chez eux….Seule la lutte paie !

Nous appelons tout le monde à venir à Calais dès samedi pour définir la
stratégie de lutte avec les migrant-e-s, mais aussi le 26 dans la nuit ou
le 27 au petit matin pour résister à l’expulsion de ces camps ! Il fut un
temps où nous étions isolé-e-s, impuissant-e-s face à la machine
répressive, maintenant, après 5 ans de lutte, nous avons toutes les cartes
en main pour être un réseau opérationnel, alors mobilisons nous en force !
Venez lutter avec les migrant-e-s !

Il faut faire craquer les autorités et c’est maintenant ou jamais !

Contre la fermeture des CAF ! La CAF de Gibbes occupée le lundi 26 mai au matin

Ce matin (lundi 26 mai): occupation du toit des locaux de la CAF par des usagers et rassemblement devant ces locaux pendant plus de deux heures. Les usagers scandent « dossiers bloqués CAF occupées! », discutent de leurs situations, de leurs difficultés depuis quelques mois à avoir des réponses, du devenir de leur droits d’allocataires, de leurs relations uniques aux bornes et vigiles de la CAF. Ils font part au personnel et à la direction venu à leur rencontre, de leur incompréhension par rapport à l’absence de mobilisation des salariés de la CAF  contre cette réforme. La direction confirme que la fermeture des accueils publique de la CAF est bien définitive et que ce nouveau dispositif de fonctionnement des CAF va petit à petit être étendu partout en France.

Après quelques heures de négociation entre le toit et le pavé, tous les dossiers des personnes présentes sont débloqués.

La police était là en nombre et sous différentes formes. Les occupants du toit sont arrêtés au bout de 4 heure par le GIPN et conduit au commissariat pour un contrôle d’identité. Les personnes ont été libéré sans aucunes suites…

POUR FAIRE FACE À CETTE RÉFORME NATIONALE DE LA CAF LE COLLECTIF CONTRE LA TRAQUE DES PAUVRE SE RÉUNIS TOUS LES VENDREDI A  18H À MILLE BABORDS au 61rue consolat
_______________________________________________
mia mailing list
mia@boum.org
https://mailman.boum.org/listinfo/mia

Prochaine Assemblée de la Plaine Mardi 27 mai

La prochaine réunion de l’Assemblée de la Plaine aura lieu  le mardi 27 mai à 19h à l’Ache de Cuba (Place Paul Cézanne)

Au menu :
– Organisation d’un grand loto de la Plaine-Noailles en soutien au
Carnaval (2014 et 2015)
– Point sur les condamnés du Carnaval 2014 (frais de justice et amendes)
– Carnaval 2015 : fixer une date, ouvrir un blog, définir les contours et
exprimer nos envies, etc.
– Réalisation d’une fresque murale à la Plaine « sur le Carnaval de la
Plaine-Noailles
– Fête de la Boule Carli au jardin des chats, dimanche 15 juin
– Initiative « l’Art prend la rue », présentation
– Autres idées, propos et projets

Soirée du collectif anti-psy Samedi 24 mai à la Marmite

Dans le cadre du weekend autour de la psychiatrie organisé par le collectif Antipsy de Marseille (avec G. Bucalo auteur du livre « Dizionnario Antipsychiatrico »)
– 19h30  Bouffe
– 21h00   Spectacle – CARENCE « Dédaccordéons » –  Concert – LA CANNE (Magic Garage) et  KARAOKE… !!!
Soirée prix libre en soutien au collectif pour le défraiement (billets pour la venue de G. Bucalo et d’un autre membre de son collectif de Sicile) et pour la création d’un infokiosque.
NO FACHO – NO MACHO – NO HOMOFOBO
La Marmite
38, cours Gouffé
Marseille M° Castellane

Rappel du programme du weekend :
Samedi: 16h discussion au local, 38 rue Clovis Hughes (pas loin de la Friche, bus 33/34 arrêt Clovis Hughes 3ème arr.)

Dimanche : à partir de 15h suite des échanges à Milles Bâbords, 61 rue Consolat (métro Réformés)

Contact : paspareil@riseup.net [1]

Une bonne journée NO TAV

Le soir du 15 mai 2014 la Cour de Cassation italienne a annullé la sentence du tribunal de Turin relative aux accusations de terrorisme pour Chiara, Claudio, Mattia e Niccolò, ils restent en prison mais le Tribunal devrat reformuler les accusations en excluant le terrorisme.
Au cours de la même journée l’enquête sur la prétendue aggression de la part de NO TAV envers l’autiste du procureur Rinaudo (un de procureur du Tribunal de Turin qui dirige l’enquête sur le NO TAV) a revelée que l’aggresion a été totalement inventée.
source: notav.info

Egypte : encore sur l’autogestion ou la réalité du moment présent

source : dndf.orghttp://dndf.org/?p=13468Il est toujours audacieux de vouloir transposer des expériences d’un lieu à l’autre, d’un continent à un autre. Toutefois pour l’analyse des pratiques autogestionnaires, nous renvoyons au texte d’une camarade de la revue grecque  « Blaumachen » : À la limite: Auto-organisation en Grèce qui pointe une résurgence des pratiques de l’auto-organisation dans des conditions de crise et qui décrit les caractéristiques centrales de ces initiatives et expose leurs limites intégrantes et aussi au paragraphe  « Argentine : une lutte de classe contre l’autonomie.« dans le  texte L’auto-organisation est le premier acte de la révolution, la suite s’effectue contre elle…

Les travailleurs luttent pour se gérer eux-mêmes

Las de l’inaction du gouvernement concernant la renationalisation judiciaire de leurs entreprises, de nombreux travailleurs ont tenté de prendre les choses en mains au travers d’expériences d’autogestion – pour s’apercevoir que le gouvernement s’opposait activement à leurs efforts.

Le mois dernier  les autorités ont stoppé une telle expérience à la Tanta Flax Company dont la renationalisation était attendue  depuis plus de deux ans.

Le 15 Mars, la Compagnie de papier du Moyen-Orient (Simo) est devenue le septième compagnie à être renationalisée par ordonnance du tribunal depuis la fin de 2011. Cependant, les autorités de l’Etat n’ont pas encore remis cette société en fonctionnement dans le secteur public.

» Nous ne pouvons pas payer nos loyers ou nourrir nos familles. Nous perdons rapidement tout espoir, car il ne semble y avoir aucune véritable préoccupation des autorités, aucune volonté réelle de résoudre nos griefs. Plus de 500 employés meurent lentement car notre entreprise est paralysée. Nous crions désespérément à l’Etat de sauver notre entreprise »

Depuis Septembre 2011, le tribunal administratif a rendu des verdicts annulant les contrats de privatisation pour la Tanta Flax Company, la Nubariya Seeds Company, la Shebin al – Kom Textile Company et la Nile Cotton Ginning Company, ainsi que la Nasr Steam Boilers Company and et la chaîne de grands magasins d’Omar Effendi.

Selon les conclusions et décisions de la Cour, ces entreprises de service public avaient été vendues à des investisseurs privés de 1990 à 2010 à beaucoup moins que leur valeur réelle sur le marché. Ces entreprises et leurs travailleurs ont été en grande partie laissés dans un état de limbes, n’étant plus exploités par des investisseurs privés ou publics.

À l’exception des magasins Omar Effendi, et à un moindre degré la Shebin al – Kom Textile Company, l’État n’a pas investi dans la renationalisation ou la relance de ces entreprises.

Dans l’espoir de retrouver leur emploi et de voir repartir leurs usines, les travailleurs de ces sept entreprises ont déposé des requêtes et organisé des manifestations et des sit-in exigeant un retour à l’emploi  dans les trois ans.

Ces appels appuyés  ont rejoints ceux des hauts responsables de l’Etat – y compris le Premier ministre Ibrahim Mehleb, le maréchal Abdel Fattah al – Sisi et le ministre de la Main-d’œuvre Nahed al – Ahsry, entre autres – pour que les travailleurs  arrêtent de manifester ou de faire grève, et pour aider à sauver l’économie en reprenant la production.

Mais ces appels à un retour à la production sonnent creux pour de nombreux travailleurs.

«C’est parler dans le vide,  pour donner du grain à moudre aux médias », dit Hicham al – OQL de la Tanta Flax and Oils Company.

«C’est le contraire de ces déclarations officielles qui est vrai. Nous, les travailleurs, sommes sans emploi et voulons ré- exploiter nos entreprises, mais le gouvernement nous empêche de nous remettre au travail. «

Poussés par la frustration et les années sans revenu, les travailleurs de la société Tanta Flax  ont été le dernier groupe à tenter leur chance dans l’autogestion de leurs usines.

Les expériences d’autogestion

Le 19 Mars, des dizaines d’anciens ouvriers ont commencé à exploiter deux lignes de production sur dix de la Tanta flax compagny. Comme la propagation de la nouvelles débordait les murs de l’entreprise, les autorités locales coupèrent  l’électricité, et l’expérience ne dura que quelques heures.

Selon OQL, les forces de police étaient envoyées à l’usine moins de deux heures après la nouvelle de l’expérience des travailleurs.

«  Ils ont affirmé sympathiser [avec] et appuyer nos efforts, puis, quelques minutes après leur départ, l’électricité a été soudainement coupée » .

Un autre ancien travailleur, Gamal Othman, explique: « Dès l’annonce de notre intention de gérer nous-mêmes l’entreprise , la Holding Company for Chemical Industries a appelé l’autorité des services publics locaux à Tanta et leur a fait couper notre électricité »

» Notre intention, dans l’ autogestion, était de montrer à la société mère qui il est facile de relancer les usines de l’entreprise , et que nous avons des matières premières  pour assurer un mois de production ,  » raconte Othman, frustré .

Othman ajoute que ses collègues et lui-même ont cherché à faire pression sur la Société mère et sur le Ministère de l’Investissement afin qu’ils donnent suite à leur promesse d’achat de la quantité nécessaire de semence de lin aux agriculteurs locaux – estimés à environ 7 millions – à la mi- mai.

«Nous craignons que si la société n’achète pas ces cultures aux agriculteurs, ils les vendent  à d’autres, et que donc les plans de redémarrage de la compagnie, l’année prochaine, ne soient jamais mis en œuvre »  prévient-il.

Aussi bien la Holding Company for Chemical Industries que le Ministère de l’Investissement ont fait des déclarations à l’effet qu’ils relanceraient la Tanta Flax Company en 2015, mais aucune date précise n’a été mentionné pour cette opération.

Othman critique l’échec du gouvernement à ré- exploiter Tanta flax et d’autres sociétés bloquées.

» Les autorités ne devraient pas payer l’indemnisation des travailleurs de leur seul salaire de base, alors qu’eux et leurs lignes de production  demeurent inutilisés. C’est un gaspillage des ressources de l’Etat. Les autorités devraient plutôt  investir dans le mouvement de remobilisation des travailleurs et de leurs entreprises, car cela profiterait à la fois l’Etat et aux travailleurs, » affirme t’il.

Les travailleurs de l’entreprise Tanta  ont été inspirés par l’expérience autogestionnaire réussie des travailleurs  de la Nubariya Quels Seed Company, engagée deux ans plus tôt. Ces deux années d’autogestion se sont avérées fructueuses pour l’entreprise, les bénéfices générés alors étant estimés à millions.

La société rentable Nubaseed avait été vendue à l’investisseur saoudien Abdel Ellah al – Kaaki en 1999 – le même homme d’affaires qui achèterait le Tanta Flax Company en 2005 .

Kaaki avait arrété ses investissements  dans ces deux sociétés en 2011, quand les travailleurs avaient déposés leur recours  devant le tribunal administratif et appeler à la renationalisation.

L’expérience d’autogestion réussie des travailleurs de Nubaseed a été stoppée par le Cabinet de l’ancien premier ministre Hazem al – Beblawi à la fin de 2013, lorsque les ministres ont interjeté appel contre le jugement de renationalisation rendu en 2011.

Le tribunal administratif devrait rendre son verdict le 12 Avril au sujet de cet appel.

Selon OQL, « La balle est dans le camp du ministère des Finances. Elle y est depuis près de trois ans, mais nous continuons à attendre une action.
Afin d’encourager le Ministère de l’Investissement à ré- exploiter notre entreprise, nous l’avons informé que nous sommes prêts à travailler sans salaire pendant un mois, gratuitement, afin de remettre notre société sur pieds et retrouver nos emplois. Pourtant, nous n’avons aucune réponse de leur part, et nous avons donc décidé d’essayer l’autogestion de la société. «

L’ancien candidat à la présidence Khaled Ali, qui a servi d’avocat pour la plupart des entreprises privatisées ci-dessus, a appelé les autorités de l’Etat à permettre aux travailleurs de gérer eux-mêmes leurs entreprises quand elles sont au point mort, ou lorsque les investisseurs fuient le pays.

Les expériences notables en autogestion comprennent celle de l’usine d’ampoule de Ramy Lakkah dans la Tenth of Ramadan City, qui a duré de 2001 à 2006. Alors que le propriétaire et investisseur avait fui le pays, cette expérience a réussi à accroître à la fois la production et les profits de l’entreprise. Après l’apurement de ses finances, l’entreprise a été remise à Lakkah à son retour de France.

Dans ce même secteur industriel, l’entreprise de textile connue comme Economic Company for Industrial Development a été gérée avec succès de 2008 à 2010. Son propriétaire, Adel Agha , avait fui le pays et abandonné plus de 500 travailleurs qui ont réussi à faire fonctionner l’entreprise eux-mêmes. Cette société, et sa société mère Ahmonseto, ont été liquidées en 2010 et fermées quand les banques ont repris possession des actifs d’Agha.

La papetière Simo 
Lorsque que les travailleurs de  la Simo ont envisagé d’autogérer leur entreprise, ils en furent incapables car le gaz et l’électricité étaient coupées depuis Juin 2013 en raison de l’incapacité des anciens propriétaires à payer leurs factures.

Comme c’est le cas avec les entreprises mentionnées ci-dessus, le tribunal administratif a constaté que la papetière Simo – qui avait été privatisée en tant que société de portefeuille d’actions en 1997, a été vendue à des investisseurs, à une fraction de sa valeur d’origine.

Plus de 500 travailleurs de l’entreprise Simo – qui employait environ 3000 travailleurs avant la privatisation – ont été sans travail,  salaire ou indemnités depuis leur recours devant le tribunal administratif en Juin 2013

» Nous avons signé des pétitions aux représentants du gouvernement , le Conseil des ministres et les autorités locales pour la ré- exploitation notre entreprise – en vain », explique Abdel Ati Gharib , président de la jonction locale du comité de Simo .

Les travailleurs de la Simo ont manifesté le 8 mars devant le siège du Cabinet avec des travailleurs de plusieurs autres sociétés bloquées, réclamant des investissements de l’État afin d’obtenir que leur entreprise soit remise d’aplomb.

Un appel, déposé par la Holding Company for Chemical Industries – qui, comme la companie Tanta, est censée gérer et superviser Simo – contre le verdict  du  15 mars, a stoppé la renationalisation de la Simo. Le tribunal administratif n’a pas encore rendu son verdict ce qui concerne cet appel.

» Notre société est très rentable et peut être réutilisée facilement avec un peu d’investissement, d’entretien et le paiement des salaires », explique Gharib .

» Nous sommes prêts et capables de nous remettre au travail, et en fait, nous insistons sur le retour au travail. Nous voulons juste le retour de nos emplois et de l’entreprise ».

Le ministère de la Main-d’œuvre doit payer un mois de salaire de base aux travailleurs de Simo à partir de la semaine prochaine, d’après Ghareeb, qui ajoute: « Bien que nous soyons  reconnaissants pour toute sorte d’aide, nous ne demandons pas l’aumône ou des solutions temporaires. Nous demandons maintenant la remise en marche de notre société et la réintégration de tous les travailleurs licenciés. »

Les travailleurs de Simo couchent à tout de rôle dans l’entreprise, située à Shubra al – Khaima, afin de protéger ses cinq usines, et de les protéger des intrus et des voleurs, explique Gareeb.

» Nous ne pouvons pas payer nos loyers ou nourrir nos familles. Nous allons rapidement perdre tout espoir, car il semble y avoir aucune véritable préoccupation des autorités, ou aucune volonté réelle de résoudre nos griefs. Plus de 500 employés meurent lentement dans la paralysie de notre entreprise. »
Nous réclamons désespérément  à l’Etat de sauver notre entreprise,  »

Ghareeb et des milliers d’autres travailleurs rappellent aux autorités la décision d’Avril 2013, qui a condamné l’ancien Premier ministre Hicham Qandil à un an de prison pour avoir omis de respecter le verdict de la renationalisation de la Nile Cotton Ginning Company.

Quand il a interjeté appel de ce verdict, la peine a été confirmée en Septembre 2013. L’ancien premier ministre a été arrêté en Décembre 2013 et purge actuellement sa peine.

«Nous voulons simplement que le gouvernement pratique ce qu’il prêche à propos de la production et la « roue de la production» dit Gareeb. Aidez-nous à ramener cette entreprise à la production , et en moins d’un mois, nous ramenons les bénéfices . «

 

 

Dans le monde une classe en lutte – avril 2014

 EGYPTE : Le mouvement de grèves continue et change, peu à peu, l’ambiance politique du pays
lire la suite sur  http://spartacus1918.canalblog.com/archives/2014/05/09/29837002.html

Les grèves ont démarré début février 2014 dans les usines textiles de la compagnie publique des « tissages et filages » lorsque les ouvriers ont constaté que la hausse du salaire minimum à 1 200 LE (la livre égyptienne ) promise pour fin janvier par le gouvernement, ne concernait que les 4,1 millions de fonctionnaires d’État et non l’ensemble des 7 millions de salariés de la fonction publique, dont eux-mêmes.
Des grèves dans la fonction publique…
La grève de l’usine textile emblématique de Mahalla el Kubra, démarrée le 10 février, a entraîné à sa suite celles de 9 autres usines du groupe, puis de proche en proche de nombreux autres secteurs de la fonction publique exclus de cette hausse du salaire minimum : les employés des postes, les salariés des magasins d’État (alimentation ou équipements ménagers), des offices notariaux, des travaux publics des ponts et routes, de l’administration agricole de l’irrigation, de l’eau et de l’assainissement, des semences, de la réforme agraire, de l’industrie d’État (pétrole, industrie ou réparation navale, centrales électriques), des transports publics, de la voirie et des éboueurs, de la banque et des assurances, de l’immobilier, des universités (employés ouvriers, techniciens ou administratifs), des musées, des infirmiers et ouvriers ou employés administratifs ou de surveillance des hôpitaux et des médecins, pharmaciens et dentistes des hôpitaux publics, qui, bien qu’exclus aussi de ces mesures de hausse du salaire minimum, réclamaient pour leur part non seulement son application mais sa hausse à 3 000 LE.
Enfin, les vétérinaires de campagne s’associaient au mouvement des médecins par une grève nationale le 23 mars suivie à 100 % dans les gouvernorats de Marsa Matrouh, Fayoum, Nouvelle Vallée, et à 49 % sur l’ensemble de l’Égypte, malgré les appels du Syndicat des vétérinaires du Caire et Gizeh à ne pas suivre le mouvement. A l’obtention de la revendication du salaire minimum, la plupart des grévistes ajoutent l’exigence du limogeage de leurs dirigeants, locaux, régionaux ou nationaux.
…ou des secteurs qui y ont appartenu
A ces grèves se sont additionnés d’autres mouvements pour le salaire minimum, dans les catégories de salariés précaires de la fonction publique ou qui y ont appartenu dans le passé. Ainsi, les ouvriers de 11 entreprises privatisées ont exigé la renationalisation de leur société, voire son redémarrage quand elle était à l’arrêt.Les nombreux salariés temporaires dans les différents secteurs publics ou d’État, exclus de la mesure, ont exigé leur titularisation, ou de pouvoir toucher directement aussi ce salaire minimum, à l’exemple des employés temporaires du gouvernorat de la mer Rouge, de Suez. Ce qui a élargi la grève à des secteurs à proprement parler d’État, comme les personnels temporaires de l’éducation (Kafr el Sheikh), du nettoyage urbain (Kafr el Dawar), les travailleurs journaliers de l’administration agricole des gouvernorats de Sohag, Louxor, Assouan, Qena, Kafr el Sheikh… S’y sont ajoutées différentes catégories d’employés temporaires des gouvernorats ou des ministères comme les chauffeurs, ceux du gardiennage, voire parfois des forces de police ou de sécurité.
… qui ont fait tache d’huile
Se sont greffées des grèves dans des secteurs municipaux, telles que le 16 mars celle des employés de la mairie de Safaga ou de Mahmudiya. Et d’autres grèves de salariés du privé non touchés par la mesure de hausse du salaire minimum, souvent pour le paiement d’arriérés de salaire mais aussi pour des hausses de salaire comme ceux de Porsche à Tanta, des ingénieurs des systèmes d’irrigation et de protection des eaux d’Assouan, ou encore contre des fermetures comme ceux du laboratoire pharmaceutique Abu Sultan.… et ont réveillé un climat de contestation dans des milieux populaires plus larges
Enfin, dans ce climat, ce qui semble apparaître à nouveau, à partir du 15 mars environ, ou en tout cas être plus visible, ce sont des manifestations diverses, comme celles de paysans du village d’Al Hammad qui ont été manifester à Kafr el Sheikh pour des problèmes d’engrais ; de ceux du lac Nasser contre l’expulsion de familles des terres qu’elles occupent.
On peut relever de même des manifestations de pêcheurs à Fayoum contre la pollution du lac, d’habitants du gouvernorat de Damiette contre la pollution de l’eau ou d’habitants du gouvernorat de Manoufiya pour la réalisation de travaux d’assainissement promis mais non réalisés.Ont aussi manifesté de jeunes diplômés au chômage pour obtenir un travail à Kharga, des employés de la banque du sang à Shebin el Kom, des boulangers de Kafr el Sheikh pour obtenir ce que leur doit la Chambre de commerce, des bouchers de Mahalla contre la fermeture d’un abattoir.Des avocats d’Edfou se sont mobilisés pour la libération d’un collègue, puis ceux d’Assouan en solidarité avec leurs collègues d’Edfou. Des vendeurs de rue du centre du Caire ont manifesté pour obtenir des conditions correctes pour leurs emplacements de vente. Des jeunes à Suez ont protesté contre la démolition d’un centre culturel. Des habitants de 40 villages, au pourtour de Kafr el Sheikh, ont protesté contre les lenteurs à la reconstruction d’un pont écroulé il y a un mois suite aux intempéries. A Huda, Abu Matamir, Damanhur, des habitants de quartier ont publiquement réclamé du pain. A Ismaïlia, ils l’ont fait contre les coupures d’électricité. A Kafr el-Dawr, contre les coupures d’eau. A Zifta, contre la pénurie de bouteilles de gaz. A Daqahliya contre la violence policière. A Shebin el Kom, des sourds et muets ont exigé un travail.
Au total, le Centre pour le développement international comptabilisait pour le mois de février 2 protestations par heure et 1 044 manifestations, dont 58 % pour des raisons économiques, essentiellement les salaires ; 33 % étaient attribuées aux Frères musulmans mais en forte baisse par rapport au mois précédent. Le Caire arrivait en première place avec 14 % de manifestations, suivi d’Alexandrie avec 13 %, et Kafr el Sheikh avec 9 %.
Enfin, l’organisme recensait 47 protestations dans l’Éducation nationale, ce qui pouvait signifier, selon ce Centre, que même si ses luttes n’étaient guère visibles, ce secteur pouvait devenir un élément clef.
Des grèves visibles et déangeantes mais qui ne rencontrent pas d’hostilité populaire
Si l’on prend par exemple ces derniers jours, du 16 au 24 mars, les 283 bureaux de poste des gouvernorats de Sohag étaient en grève et fermés, mais aussi tous ceux de Suez et Port-Saïd, et en majeure partie ceux des gouvernorats de Marsa Matrouh, Qalahbiya, Alexandrie, Luxor, Fayoum, Qena, Kafr el Sheikh, Sharkiya, Beni Suef, Nouvelle Vallée et la plupart des autres. Certains ont à peine commencé la grève depuis quelques jours mais d’autres le sont depuis un mois. Pas de courrier donc.
Les transports publics en grève ne fonctionnaient pas à Alexandrie, bus et tramway, pendant une semaine jusqu’au 18 mars, après Le Caire. Les poubelles et immondices s’accumulent parce que les éboueurs sont en grève, parfois depuis plus de trois semaines.
Les magasins d’État sont fermés. Les hôpitaux publics sont en grève parfois totale comme à Tanta ou Hurghada. Et partout les médecins, pharmaciens, dentistes font une grève quasi suivie à 100 % dans la majorité des établissements ; des écoles ne sont ouvertes qu’à moitié faute des enseignants temporaires en grève ; les compagnies d’assurances fonctionnent de manière chaotique, pour les mêmes raisons, etc.
Bref, c’est toute la vie quotidienne qui est perturbée. Ce qui est frappant dans ces grèves, c’est que malgré les appels du gouvernement à la responsabilité des salariés à l’égard des usagers, malgré l’engouement d’une partie de la population pour Sissi et son hostilité à tout ce qui peut faire entrave à l’action du maréchal, non seulement elles continuent, mais elles ne semblent pas rencontrer d’animosité de la part du public. Ce qui semble confirmer que ces grèves et manifestations expriment dans la rue ce qui avait déjà été révélé dans les urnes par la forte abstention au référendum/plébiscite des 14 et 15 janvier. Autrement dit, une désaffection certaine à l’égard du maréchal Sissi.
On ne constatait ainsi qu’une altercation entre grévistes et usagers dans un hôpital à Dosouk, sachant que quand il n’y a pas de grèves elles y sont déjà fréquentes. La grève des postes est pénalisante pour beaucoup, avec par exemple le blocage du versement des pensions de retraite ou celui du courrier des entreprises, mais la presse ne signalait que 4 bureaux où avaient eu lieu des affrontements entre usagers et grévistes, à Alexandrie, Assouan, Kafr el Sheikh (deux fois).
Il faut dire qu’une autre chose marquante est tout à la fois l’énorme faiblesse des salaires de la fonction publique, qui vont souvent de 350 à 600 LE par mois, soit environ 44 à 76 CHF (or les prix flambent, les loyers ont été souvent multipliés par deux ou trois en peu de temps et on trouve difficilement quelque chose à moins de 500 LE au Caire ou à Alexandrie), et le fait que pour une fois la presse cite ces salaires si bas. Elle contribue ainsi non seulement à la compréhension des usagers mais aussi à ce que chacun des grévistes prenne mieux conscience qu’il n’est pas qu’un éboueur de tel ou tel endroit ou un vendeur de magasin de tel autre, mais qu’il appartient à une catégorie bien plus large, partageant les mêmes conditions et capable de bloquer toute la société. Tout se passe comme si les grèves de la fonction publique éveillaient à nouveau, peu à peu et de proche en proche, toute la société des classes populaires après sept mois de silence, de violence du pouvoir et d’occupation de tout l’espace politique par le conflit sanglant entre l’armée et les Frères musulmans.
Le gouvernement cède et promet
Dans cette ambiance de grèves, le gouvernement Beblaoui est tombé le 24 février pour tenter de calmer la colère populaire. L’attitude du gouvernement, qui s’est démis le 24 février, comme de celui qui a suivi celui d’Ibrahim Mehleb, a été de temporiser ou de reculer sans réprimer même si, ici où là, il y a quelques tentatives comme à l’entreprise Céramica de Suez. Mais pour ces derniers, cette répression n’a pas duré, du fait de la menace des syndicats de Suez d’appeler toute la région à entrer en lutte si cela se reproduisait. Les deux gouvernements répondent le plus souvent par un discours qui, dit comprendre les revendications des grévistes. Ils cèdent partiellement ou totalement, mais dans le cadre d’une péroraison générale expliquant que l’Égypte n’est pas en situation de pouvoir les satisfaire, et que pour cela il faut construire une économie plus forte et donc travailler plus, bref cesser de faire grève. Parfois, comme avec les médecins, le gouvernement promet qu’il essaiera de satisfaire les revendications mais qu’il faut lui laisser un peu de temps puisqu’il est nouveau, en général deux ou trois mois, soit le temps d’étudier la situation ou de trouver des solutions. En attendant, il s’agit de reprendre le travail. C’est ce qu’il a dit le 16 mars aux médecins, pharmaciens et dentistes, leur demandant un délai de trois mois et en faisant appel à leur souci de la santé publique et leur esprit patriotique. Une troisième attitude, par exemple avec les postiers, est de leur proposer une augmentation de salaire ou de bonus relativement modeste, 100 à 150 LE, et de ne rien promettre pour le salaire minimum. Une quatrième attitude, souvent couplée avec la troisième, consiste à donner partiellement satisfaction mais à un niveau plus élevé ; par exemple le paiement d’arriérés de salaires ou bonus, des augmentations de ces salaires ou bonus, des primes exceptionnelles ou mensuelles non négligeables, ce qu’ils ont fait à des degrés divers pour les salariés du textile, ceux des ponts et chaussées, des éboueurs ou encore des transports du Caire et d’Alexandrie. En même temps, ils font la promesse qu’ils accorderont dans un ou deux mois le salaire minimum ou en tout cas qu’ils feront tout pour ça. Ce qui a entraîné la suspension de ces derniers mouvements (textile, transports, ponts et chaussées).
18/03, Un projet déjà élaboré sous Moubarak vise à modifier de fond en comble le système de subventions alimentaires qui concerne 18,2 millions d’Egyptiens titulaires de sortes de cartes de rationnement, sans compter les subventions directes à des produits de base comme la farine et autres produits alimentaires. Soi-disant mis en œuvre pour éliminer les fraudes, il vise surtout à réduire le montant de ces subventions.
Les grèves durent, s’affermissent, s’enhardissent, et on cherche en tâtonnant à se coordonner et à se centraliser
Les succès partiels ont fait reprendre le travail à certains mais ont entraîné dans la lutte d’autres salariés qui voulaient obtenir ce qu’avaient eu les premiers. Les salariés des transports d’Alexandrie sont entrés en lutte après que ceux du Caire ont obtenu partiellement satisfaction en demandant la même chose qu’eux. Les éboueurs d’Edfou sont entrés en lutte pour obtenir ce que ceux d’Assouan avaient eu, etc.
Par ailleurs, si le gouvernement a obtenu la reprise du travail dans un certain nombre de secteurs avec son mélange de promesses et de satisfaction partielle des revendications, les travailleurs semblent assez méfiants face aux promesses. En effet, les employés des transports d’Alexandrie, après leur succès partiel, ont tenu à faire une conférence de presse pour déclarer que, contrairement à ce qui avait été dit, ils se considéraient toujours en lutte, prêts à reprendre la grève à tout moment s’ils avaient le sentiment d’être menés en bateau, surveillant les faits et gestes du gouvernement.
Autre exemple, les 8 000 ouvriers de l’usine de « tissage et filage » de Kafr el Dawar multiplient débrayages, grèves, sit-in et manifestations ou séquestration de leur directeur le 20 mars, pour rappeler leurs revendications pendant que les 24 000 ouvriers de l’usine du même groupe à Mahalla, à quelques dizaines de kilomètres de là, ne sont pas non plus passifs. Ils ont entamé une campagne de signatures proclamant l’illégitimité du syndicat d’État et celle du ministre du Travail, Nahed Elachry.
Là où les travailleurs semblent avoir le plus de mal à coordonner leur action, comme dans les différentes catégories de salariés travaillant dans le nettoyage et surtout pour le ministère de l’Agriculture, le gouvernement semble n’avoir rien cédé ni promis et même menacé le 23 mars de licencier certains salariés en lutte du monde de l’agriculture. Cependant, le mouvement tient bon, les grèves ne faiblissent pas et il est au contraire bien possible que les menaces unifient un peu plus l’ensemble.
Cette tendance à l’unification a en effet été réalisée bien involontairement, en grande partie par le gouvernement lui-même avec les salariés des postes. Ceux-ci mènent un mouvement assez large depuis plusieurs semaines, en mars, mais qui semble inégal suivant les gouvernorats et assez décousu puisque sur les dizaines de milliers de salariés des postes, certains font grève sans discontinuer, d’autres entrent en lutte puis reprennent le travail, puis se remettent en grève. D’autres encore font des grèves partielles pendant que d’autres enfin commencent à peine. Le nombre de grévistes sur l’ensemble est toutefois très important puisque le journaliste Hanni Shukrallah estimait qu’il avait atteint certains jours une participation de 80 %, avec de nombreux gouvernorats au taux de grévistes de 100 %.On constatait ici et là des tentatives de coordination, tout comme la volonté de s’adresser à la population par l’organisation de manifestations locales ou régionales…
Et puis, le 23 mars, le ministre des Communications a rajouté une touche nationale de coordination et de centralisation en recevant des représentants des postiers en grève pour leur proposer une satisfaction partielle. Ceux-ci, les considérant insuffisantes, ont refusé mais ont aussi profité de s’être rencontrés au Caire pour déclarer qu’ils allaient maintenant essayer de mieux coordonner leur lutte et ont commencé en lançant depuis le ministère un appel à la grève générale illimitée de tous les métiers de la poste. Ce qui semble avoir été suivi d’effets puisqu’aux gouvernorats, où la participation était déjà de 100 %, s’ajoutait l’entrée ou la reprise de la grève totale dans quelques autres régions jusque-là un peu moins touchées. Et le 23 mars, les postiers de Zagazig franchissaient un pas en séquestrant puis expulsant de son bureau le directeur au siège social de la poste du gouvernorat [1].Cette recherche tâtonnante de l’unification se voit également dans 11 entreprises industrielles récemment privatisées, qui ont en effet constitué au 10 mars une coordination des entreprises privatisées pour leur renationalisation ou leur remise en marche pleine et entière.
La radicalisation se lit dans le fait que les ouvriers d’une usine de Shebin al Komsont sortis de leur usine et ont bloqué la route, puis le siège du gouvernorat de Menoufiya.
Elle se voit aussi dans les professions de la santé, médecins, pharmaciens et dentistes des hôpitaux publics ainsi que pharmaciens privés et vétérinaires de campagne qui ont formé, au-delà de leurs syndicats respectifs, un comité de grève central et national sous contrôle d’une assemblée générale nationale mensuelle, qui anime la grève nationale illimitée de ce secteur suivie depuis début mars au moins à 80 % par les médecins, avec des pointes à 100 % dans certains hôpitaux ou même certains gouvernorats entiers (97,3 % pour le gouvernorat d’Alexandrie le 19 mars).
Ce comité de grève allait même au-delà de la profession puisqu’il répondait publiquement à la mi-mars à Sissi – qui leur demandait de reprendre le travail au nom des usagers et de la patrie –, en lui disant que s’il avait vraiment ce souci, il fallait : qu’il ouvre les hôpitaux militaires, bien mieux dotés, aux malades en difficulté ; qu’il fasse passer le budget de la santé de 3 à 15 % ; qu’il publie les salaires mirobolants des dirigeants du secteur de la santé et qu’ils les versent aux plus pauvres.
Ainsi ce comité de grève s’adressait à tous les Egyptiens, faisant ses premiers pas en politique, montrant au pouvoir que c’est lui qui pourrait très bien faire passer cette marche au mouvement social. Depuis, Sissi s’est tu.
Enfin, et peut-être encore plus significatif, à la mi-mars se constituait une coordination des représentants de deux secteurs en lutte, le comité de grève des professions de la santé et la coordination pour la nationalisation des entreprises privées, associés à des représentants syndicaux des postiers, des salariés des chemins de fer et de l’aviation civile. A la conférence de presse de la fondation, ses animateurs déclaraient qu’ils avaient compris qu’il leur fallait s’unir pour espérer gagner et que leur faiblesse jusque-là avait été de mener leurs luttes isolément les uns des autres. Pour mieux unifier leurs luttes, ils avaient établi un programme commun reprenant l’essentiel de leurs revendications, à savoir : le salaire minimum pour tous, la renationalisation des entreprises privatisées, le limogeage de tous les dirigeants au niveau local ou national et la revalorisation du budget de la santé.
Pour le moment, on ne peut pas mesurer encore le poids réel de cette coordination sur les événements – sinon la radicalisation du mouvement de la santé qui s’est étendu à la médecine ambulatoire, aux centres d’enseignement thérapeutique, aux secrétariats des hôpitaux, aux employés des ministères et des assurances maladie –, mais il est sûr que cela dénote une tendance vers la défense coordonnée des intérêts ouvriers, et par là, de leurs intérêts politiques, même si, bien sûr, les obstacles sont encore nombreux. Effet des grèves sur la vie politique et les 529 condamnations à mort des Frères musulmans
Le nouvel éveil de la société par ces grèves va plus loin encore que les classes populaires.
En effet, après la démission du gouvernement Beblaoui et donc le départ des forces libérales, démocrates, nassériennes et de gauche du gouvernement (à part le Wafd), Sissi repousse depuis un mois l’annonce de sa candidature à la présidentielle et les autorités repoussent l’ouverture de la campagne électorale ; elles craignent qu’elle se déroule sous la pression des grèves.
On entend des bouches critiques s’ouvrir à nouveau dans les milieux laïques d’opposition à l’encontre du gouvernement et de l’armée après sept mois de silence. On voit des journalistes oser publier dans la presse ce qu’ils n’osaient plus et desmanifestations diverses pour les libertés recommencent à fleurir. Un humoriste comme Bassem Youssef radicalise un peu plus sa satire politique ; des intellectuels, artistes ou écrivains qui soutenaient l’armée jusque-là s’en détournent. Des prisonniers du mouvement démocratique sont libérés – comme Alaa Abdel el Fattah – même si bien sûr cela ne suffit pas. Les organisations révolutionnaires multiplient les protestations, comme le 23 mars dans de nombreuses villes d’Égypte, pour exiger la libération des prisonniers politiques.
Une anecdote significative parmi d’autres est que lorsque le gouvernement a demandé un an, six mois ou trois mois de suspension des grèves pour la patrie, un animateur télé, Amr Adeeb, a demandé un arrêt des conflits du travail pendant six mois pour sauver l’Égypte. Aussitôt, en réponse, s’est mis en place un site Facebook proposant aux hommes d’affaires, généraux, ministres, juges, hauts fonctionnaires, acteurs, joueurs de football connus et journalistes vedettes de ne garder pour eux que le salaire minimum de 1 200 LE et de verser le reste de ce qu’ils gagnent, c’est-à-dire des milliards, au peuple égyptien pour sauver les Egyptiens. De suite, le site a reçu des milliers d’informations et de témoignages sur les revenus, le patrimoine caché, et la vie luxueuse des élites égyptiennes.On voit également le candidat nassérien à la présidentielle Hamdeen Sabbahi oser rendre Sissi responsable – au moins en partie – de tout ce qui ne va pas en Égypte. Ce qui aurait été impensable il y a quelques mois et lui aurait valu une condamnation sévère. Cette ambiance se révèle jusque dans les faits divers puisque les hauts responsables militaires ont tenu à dénoncer à la télévision, le 24 mars, tous ceux qui utilisaient le nom de Sissi pour récolter des dons en faveur de sa candidature, afin… de mieux les détourner dans leurs poches. La dictature tourne-t-elle en farce ?
Les grèves et les manifestations ont – une nouvelle fois – totalement invalidé dans les faits la loi de novembre 2013 interdisant grèves et manifestations, même si libéraux, démocrates ou gauche ne semblent pas vraiment s’en rendre compte ou vouloir en tenir compte
(1)Selon Mena Solidarity Network, en date du 25 mars 2014, les dirigeants de la grève des postes à Alexandrie ont été arrêtés dans leur maison par des descentes de police effectuées avant l’aube. Les dirigeants arrêtés sont Ismail Gabr, Haitham Uthman, Ayman Hanafi, Hani Said et Hisham Abd-al-Hamid. Selon l’avocat du travail Mohammed Ramadan, les cinq hommes devaient être présentés devant le procureur de Moharrem Bey. Les travailleurs de la poste ont immédiatement organisé une marche et une manifestation massive devant le principal bureau de poste d’Alexandrie. Selon Mena, les travailleurs de la poste d’Alexandrie participent à la grève nationale appelée par le Syndicat indépendant des travailleurs de la poste dont les dirigeants affirment que 70 % des 52 000 travailleurs sont entrés en grève pour exiger de meilleurs salaires et l’obtention du salaire minimum à l’échelle nationale.

 

[Tunisie] Des députés dégagés de Sidi Bouzid

La séance prévue samedi à Sidi Bouzid dans le cadre du mois de la Constitution a été perturbée par la protestation des habitants contre le rendement du gouvernement et de l’Assemblée nationale Constituante (ANC).

Des slogans dénonçant l’« infantilisation du peuple et l’instrumentalisation du dossier des martyrs » ont été scandés.

Les protestataires ont appelé à une deuxième révolution et à la dissolution de l’ANC, insistant sur leur droit à l’emploi, la liberté et la dignité. Les membres de l’ANC représentant Sidi Bouzid ont été accueillis par des « dégage », pour avoir ignoré les préoccupations de la région et son droit au développement.

« La région n’a pas besoin de connaître la nouvelle Constitution, elle a besoin d’emploi et de développement » ont-ils martelé. Ils ont appelé à cesser de poursuivre les jeunes de la région qui avaient participé à des mouvements de protestation.

Le président de l’ANC Mustapha Ben Jaafar qui était arrivé dans la ville de Sidi Bouzid pour donner le coup d’envoi du mois de la Constitution n’a pas pu rejoindre le lieu de la réunion en raison des protestations.

L’assesseur des relations avec les citoyens, la société civile et les Tunisiens à l’étranger à l’ANC a expliqué que Sidi Bouzid qui a vu naître l’étincelle de la révolution a été choisi pour le lancement du mois de la Constitution. Une manifestation initiée avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

Leur presse (DirectInfo avec TAP, 10 mai 2014)