Alors qu’un énième sommet européen qui s’est tenu aujourd’hui même [ce 26 juin 2015] marque une étape supplémentaire dans la construction de la forteresse Europe, 150 migrant·e·s, réfugié·e·s ou pas, continuent d’opposer une résistance acharnée, auto-organisée et exemplaire sur les rochers de Vintimille.
Tandis que les déportations de masse se banalisent dans toute l’Europe sans aucun respect du cadre légal de Schengen, tandis que toutes les frontières d’un espace soit-disant de liberté se voient remilitarisées, la résistance s’organise : les migrant·e·s ne sont pas disposé·e·s à être traité·e·s comme de simple marchandises et, comme sur ces rochers, parlent avec leurs corps.
Les actes de résistance et d’insubordination, eux aussi, se multiplient dans une indifférence quasi-générale. Ce fut le cas mercredi dernier dans le centre d’accueil de Crotone. Dans un lieu surbondé, les autorités ont tenté de forcer physiquement certains migrant·e·s à fournir leurs empreintes digitales. Ceux-ci se sont révolté·e·s, permettant à une vingtaine d’entre eux de retrouver la liberté.
Ici, sur quelques rochers bloqués entre deux Etats qui refoulent autant de migrant·e·s que possible, certains migrant·e·s scandent « We are not going Back » depuis désormais deux semaines et mettent en échec les forces de l’ordre en s’installant sur des rochers accidentés, terrain hostile pour les agent·e·s assermenté·e·s. Malgré tout le dispositif sécuritaire, la militarisation de la région en cours, nombre d’entre eux ont su trouver les failles du filet, et rentrer en France en prouvant encore une fois que stopper les migrations est impossible.
Quant à celles et ceux qui sont resté·e·s, ils expriment quotidiennement leur colère face à cette condition de clandestinité auxquelles les politiques migratoires européennes les condamnent. A force de trains et de déportations, beaucoup de migrant·e·s e sont retrouvé·e·s sans argent et donc bloqué·e·s là, appelant la France à rouvrir la frontière.
Un réel jeu de chat et de souris se joue sur tout le territoire entre Vintimille et Nice, où les contrôles au faciès sont devenus la norme dans la ville d’Estrosi.
Mais les rochers de Vintimille sont également devenus une sorte de zone d’autonomie temporaire où se construisent des formes de solidarités multiples, singulières et concrètes entre Européen·e·s solidaires et migrant·e·s. Un réel espace de socialité fait de rencontres et d’amitiés improbables dans un monde fait de frontières et d’exclusion.
Par-delà les associations, ONG, organisations humanitaires – entre aide concrète et collaboration avec les autorités – des individu·e·s, réseaux, habitant·e·s locaux, viennent quotidiennement, refusent de laisser les migrant·e·s seul·e·s face aux flics et aux fachos. Ces personnes refusent également de parler à leur place, se contentant de tout faire pour répondre à leurs besoins et leurs demandes en tout respect de leur autonomie.
Mais ces personnes sont également là pour elles-mêmes, car ces migrant·e·s ne sont pas seulement des personnes en détresse comme trop souvent les médias les décrivent : les migrant·e·s ont des histoires à raconter, des choses à nous enseigner, tandis que personne, des journalistes aux politicien·ne·s, ne les écoute. On peut ainsi trouver des cours de français, d’anglais, et d’arabe (pour les personnes venu·e·s en solidarité), un panneau solaire installé par un paysan de la région, des douches installé·e·s par nous-mêmes, des cours informels de droit des étrangers, des matchs de foot et pleins d’autres choses.
A toutes celles et ceux qui pensent que le problème ce n’est pas les migrant·e·s, mais les frontières, que ces migrant·e·s ont pleins de choses à nous apprendre, et qui veulent prouver aux migrant·e·s qu’il existe une Europe heureuse de les accueillir : voici un appel à rejoindre la frontière franco-italienne.
Plus d’infos sur Facebook : Presidio Permanente Ventimiglia
Ce dont on a besoin ici :
– Téléphones portables avec carte sim Lyca
– Des portables avec clés internet
– De quoi faire de l’électricité
– Des journaux en arabe et anglais
– Dictionnaires arabe-français, arabe-anglais